Ci-dessus, M. Gabriel Dufault, de L'Union Nationale Métisse Saint-Joseph du Manitoba
Le rappel de notre histoire par le Lien de Mémoire officiel de la Communauté (ci-bas, avec la plume de la parole) a été accompagné d'un rituel de fumigation et a été clôturé par le chant et le tam-tam de Claude Jean (ci-haut), un homme médecine de notre communauté.
Une présence remarquée
Les Métis du Québec et ceux de l'Ouest étaient présents, ce 21 juin 2008, et en grand nombre, au pays du Saguenay, pour souligner la fête annuelle des Autochtones du Canada, dont celle des Métis. Ce fut une première à maints égards. Une première d'abord parce qu'elle a marqué, officiellement, le rapprochement entre les Métis de l'Ouest, du Sud, de l'Est et du Nord du Canada et du Québec. Une première également dans la manière de rendre hommages aux mânes des ancêtres enterrés dans le cimetière du poste de traite de Chicoutimi (officiellement béni en 1676). Et une première, enfin, parce que, pour la première fois de notre histoire, les Métis qui s'y sont retrouvés nombreux, ont pu participer à la cérémonie du souvenir présidée par le Lien de Mémoire de la CMDRSM, sur la fosse commune du cimetière de Chicoutimi, là où furent déposés les restes de nos ancêtres « sauvages », exhumés en 1879 du vieux cimetière du poste de traite.
Un invité de marque dont il faut plus particulièrement souligner la présence, M. Gabriel Dufault, président de L'Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba. Un cousin et descendant de la nation de Louis Riel, qui a fait le grand voyage jusqu'ici pour attacher officiellement le lien de la fraternité qui unit tous les Métis du Canada en un seul et même Peuple. Il faut souligner également, une présence toute aussi appréciée, des clans de la Côte-Nord du Québec, et des autres venus en délégations de la Gaspésie, de Montréal, de Maniwaki, de la Mauricie, de l'Estrie, de Lasarre en Abitibi, des Hautes Laurentides et de Yamachiche.
Discours du président-chef
Dans son mot de bienvenue, le président-chef de la CMDRSM, Jean-René Tremblay, a souligné notamment l'importance de cette grande union et il a prestement demandé aux gouvernements provincial et fédéral « d'arrêter le harcèlement juridique à notre égard ». Il ne s'est pas privé pour dire que « cette pratique est indigne d'un gouvernement qui foule au pied l'honneur de la Couronne. » « Nous sommes un des peuples qui ont bâti ce pays, a-t-il réitéré, et, tôt ou tard, malgré votre obstination, ces gouvernements devront nous reconnaître et travailler avec nous à développer ces terres qui nous ont été volées. C'est une condition essentielle à notre coopération, à une paix sociale et à l'harmonie entre les nations Amérindiennes, Québécoise et Métisse. »
Toujours en pointant du doigt les deux paliers de gouvernements du sud, le président-chef a conclu son discours en réitérant « que nous, de la Nation Métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, ne reconnaissons aucune de vos lois qui ont servi et servent toujours à nier notre existence et celle de nos enfants, à faire disparaître notre culture et à nous asimiler à votre manière de vivre et penser. »
Ce fut donc un grand discours, de bien belles présences, une grande et belle journée, et une promesse d'avenir qui ne demande plus qu'à être alimentée par le rappel de l'histoire, de notre culture et de la lutte qui marque ce temps de passage important avant notre reconnaissance officielle qui nous redonnera un souffle de dignité...
Russel Bouchard
Lien de Mémoire de la CMDRSM
dimanche, juin 22, 2008
jeudi, juin 19, 2008
Alors qu'il devrait les protéger, l'État du Québec déclare la guerre à outrance aux Métis de la Boréalie avec leur propre argent !
Imaginez l'ironie de cette histoire sordide qui ne peut se passer qu'au Québec. Une guerre à finir. Une guerre qui a commencé en 1851, lorsque le parlement du Bas-Canada a voté une loi pour dépouiller de leur titre toutes les femmes « sauvages » du Pays. Ce qui a permis d'éliminer d'un coup, tous les Métis et leur descendance, et de refouler dans des réserves indiennes ceux qu'il ne pouvait éliminer de ce premier coup.
Pendant qu'on donne des privilèges aux derniers arrivants en les reconnaissance de suite (des droits que les Métis n'ont pas !), les Métis du Québec subissent l'outrage ultime...
Russel Bouchard
Lien de Mémoire de la CMDRSM
Lisez plutôt le communiqué qui suit :
21 juin 2008, Fête des Autochtones
Le procès de Chicoutimi :
Québec s’engage et débloque plus d’un million $ pour contrer les Métis
Québec s’engage dans un important et historique procès contre les Métis du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan (DRSM). Il s’agit d’une première judiciaire, où un groupe de Métis du Québec feront valoir des droits sur une partie du territoire de la Province. Les objets fondamentaux de ce procès qui se tiendra devant la Cour supérieure du district de Chicoutimi sont de deux ordres : Faire démolir 15 camps métis qui, aux dires du Procureur général, ont été bâtis sans la permission de l’État, sur les terres publiques;
Faire la démonstration qu’il n’y a pas de Métis au Québec selon les critères de l’arrêt Powley, rendu par la Cour suprême du Canada et, en conséquence, que les Métis n’ont aucun droit au sens de l’article 35 de la constitution Canadienne.
Le Procureur général du Québec a annoncé qu’il ferait intervenir 12 experts et déposerait 2000 documents pour démontrer la non-existence d’une communauté métisse dans le DRSM. À cet effet, il a demandé 70 jours d’audition pour faire sa preuve devant l’honorable juge Roger Banford de la Cour supérieure de Chicoutimi. Il s’agit donc d’un « méga-procès » ou l’État est prêt à dépenser plus d’un million de $ en utilisant les immenses moyens financiers dont il dispose, pour contrer une communauté métisse.
Quant aux métis poursuivis, leur cause fait l’objet d’un cas type, celui du métis Ghislain Corneau, que l’État cherche à déposséder de son camp depuis plus de 10 ans. Cette cause est soutenue par la Communauté métisse du DRSM. À l’évidence, cette dernière ne dispose pas des mêmes moyens financiers que le Gouvernement du Québec, qui a accès au grand réservoir des payeurs de taxes. Les droits ancestraux des Métis du Québec se retrouvent au centre d’un combat à armes inégales.
L’État du Québec, comme l’État Canadien, est fiduciaire des droits des autochtones et à ce titre, il doit s’assurer que leurs droits sont protégés. Il en va de l’honneur de la Couronne. Québec doit se comporter de manière honorable et rétablir la situation, en assistant les Métis dans leur démarche judiciaire. Il faut se rappeler que le procès des Powley (métis) en Ontario, a été payé par l’État. Ils ont eu droit à une défense pleine et entière. Ils ont ainsi fait la preuve, jusqu’en Cour suprême du Canada, qu’ils avaient des droits de chasse protégés par la Constitution canadienne.
Les Métis du Québec, comme ceux d’Ontario et d’ailleurs au Canada, ont les mêmes droits et devraient compter sur les mêmes moyens pour les faire valoir. Il ne faudrait pas se retrouver au Québec, devant une justice à deux vitesses dans le même pays !
Plus d’informations :
René Tremblay, porte-parole CMDRSM
Tél. 418-674-2472, ou 418-693-914
Pendant qu'on donne des privilèges aux derniers arrivants en les reconnaissance de suite (des droits que les Métis n'ont pas !), les Métis du Québec subissent l'outrage ultime...
Russel Bouchard
Lien de Mémoire de la CMDRSM
Lisez plutôt le communiqué qui suit :
21 juin 2008, Fête des Autochtones
Le procès de Chicoutimi :
Québec s’engage et débloque plus d’un million $ pour contrer les Métis
Québec s’engage dans un important et historique procès contre les Métis du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan (DRSM). Il s’agit d’une première judiciaire, où un groupe de Métis du Québec feront valoir des droits sur une partie du territoire de la Province. Les objets fondamentaux de ce procès qui se tiendra devant la Cour supérieure du district de Chicoutimi sont de deux ordres : Faire démolir 15 camps métis qui, aux dires du Procureur général, ont été bâtis sans la permission de l’État, sur les terres publiques;
Faire la démonstration qu’il n’y a pas de Métis au Québec selon les critères de l’arrêt Powley, rendu par la Cour suprême du Canada et, en conséquence, que les Métis n’ont aucun droit au sens de l’article 35 de la constitution Canadienne.
Le Procureur général du Québec a annoncé qu’il ferait intervenir 12 experts et déposerait 2000 documents pour démontrer la non-existence d’une communauté métisse dans le DRSM. À cet effet, il a demandé 70 jours d’audition pour faire sa preuve devant l’honorable juge Roger Banford de la Cour supérieure de Chicoutimi. Il s’agit donc d’un « méga-procès » ou l’État est prêt à dépenser plus d’un million de $ en utilisant les immenses moyens financiers dont il dispose, pour contrer une communauté métisse.
Quant aux métis poursuivis, leur cause fait l’objet d’un cas type, celui du métis Ghislain Corneau, que l’État cherche à déposséder de son camp depuis plus de 10 ans. Cette cause est soutenue par la Communauté métisse du DRSM. À l’évidence, cette dernière ne dispose pas des mêmes moyens financiers que le Gouvernement du Québec, qui a accès au grand réservoir des payeurs de taxes. Les droits ancestraux des Métis du Québec se retrouvent au centre d’un combat à armes inégales.
L’État du Québec, comme l’État Canadien, est fiduciaire des droits des autochtones et à ce titre, il doit s’assurer que leurs droits sont protégés. Il en va de l’honneur de la Couronne. Québec doit se comporter de manière honorable et rétablir la situation, en assistant les Métis dans leur démarche judiciaire. Il faut se rappeler que le procès des Powley (métis) en Ontario, a été payé par l’État. Ils ont eu droit à une défense pleine et entière. Ils ont ainsi fait la preuve, jusqu’en Cour suprême du Canada, qu’ils avaient des droits de chasse protégés par la Constitution canadienne.
Les Métis du Québec, comme ceux d’Ontario et d’ailleurs au Canada, ont les mêmes droits et devraient compter sur les mêmes moyens pour les faire valoir. Il ne faudrait pas se retrouver au Québec, devant une justice à deux vitesses dans le même pays !
Plus d’informations :
René Tremblay, porte-parole CMDRSM
Tél. 418-674-2472, ou 418-693-914
mercredi, juin 18, 2008
L'Approche commune : si vous croyez avoir tout vu, vous êtes dans l'erreur !
Voilà un commentaire, de l'un des habitués de ce blogue, que je trouve sufisamment pertinent et qui soulève assez d'inquiétudes pour être soumis à l'attention de nos lecteurs par cette fenêtre d'exception.
Si vous avec des impressions et des remarques. Ne vous gênez pas.
Russel Bouchard
Sylvain l'Artiste écrit :
« Je viens d'entendre une nouvelle à la radio, ce 18 juin, à l'effet que l'expérience pilote de la patrouille maritime conjointe à la frontière États-unis - Canada au Québec va se généraliser dans tout le Canada. Or, il paraît que les partis d'opposition sont inquiets, car ces négociations avec la GRC se passent dans le secret le plus total, ils ne sont même pas au courant des tenants et aboutissants de toute cette affaire, et ils voudraient avoir leur mot à dire là-dedans.
J'aimerais bien que ce soit la même chose pour l'Approche commune, qu'on peut aussi considérer comme une expérience pilote, avant que ça se généralise dans tout le Canada. Que savent-ils, les partis d'opposition, sur les négociations actuelles? et qu'en sera-t-il encore de leur information à la veille de la signature?
C'est grave. Imaginons simplement que les patrouilles maritimes conjointes américaines-canadiennes se concrétisent, d'une part, et que le principe de l'Approche commune réussisse à s'appliquer dans toutes les provinces, ou une grande partie, d'autre part, nous serons pris entre deux feux, entre les américains et les Indiens des réserves. Chacun pourra mettre son nez dans nos affaires, et il y aura sûrement collaboration, en plus, entre les américains et les fiefs amérindiens pour nous coincer encore davantage. Rappelons-nous de la carte du Nitassinan Innu soumis par le triumvirat Innu, leur frontière passe au milieu du fleuve ainsi qu'au milieu du Saguenay, ce qui implique que les Innus auraient, ou pourraient avoir, éventuellement, droit à leur patrouille des frontières maritimes. Ce n'est pas banal, inclure le fleuve St-Laurent et la rivière Saguenay dans leurs manoeuvres; la Garde Côtière pourrait avoir à partager des renseignements avec ces gens-là, en plus d'avec les gardes côtiers américains, d'autre part.
Notre souveraineté réduite à une peau de chagrin, il ne restera plus qu'à ... . Que nous restera-t-il, finalement? On n'aura plus grand pouvoir de négociation, d'un côté ou de l'autre.
Sylvain L'Artriste
Si vous avec des impressions et des remarques. Ne vous gênez pas.
Russel Bouchard
Sylvain l'Artiste écrit :
« Je viens d'entendre une nouvelle à la radio, ce 18 juin, à l'effet que l'expérience pilote de la patrouille maritime conjointe à la frontière États-unis - Canada au Québec va se généraliser dans tout le Canada. Or, il paraît que les partis d'opposition sont inquiets, car ces négociations avec la GRC se passent dans le secret le plus total, ils ne sont même pas au courant des tenants et aboutissants de toute cette affaire, et ils voudraient avoir leur mot à dire là-dedans.
J'aimerais bien que ce soit la même chose pour l'Approche commune, qu'on peut aussi considérer comme une expérience pilote, avant que ça se généralise dans tout le Canada. Que savent-ils, les partis d'opposition, sur les négociations actuelles? et qu'en sera-t-il encore de leur information à la veille de la signature?
C'est grave. Imaginons simplement que les patrouilles maritimes conjointes américaines-canadiennes se concrétisent, d'une part, et que le principe de l'Approche commune réussisse à s'appliquer dans toutes les provinces, ou une grande partie, d'autre part, nous serons pris entre deux feux, entre les américains et les Indiens des réserves. Chacun pourra mettre son nez dans nos affaires, et il y aura sûrement collaboration, en plus, entre les américains et les fiefs amérindiens pour nous coincer encore davantage. Rappelons-nous de la carte du Nitassinan Innu soumis par le triumvirat Innu, leur frontière passe au milieu du fleuve ainsi qu'au milieu du Saguenay, ce qui implique que les Innus auraient, ou pourraient avoir, éventuellement, droit à leur patrouille des frontières maritimes. Ce n'est pas banal, inclure le fleuve St-Laurent et la rivière Saguenay dans leurs manoeuvres; la Garde Côtière pourrait avoir à partager des renseignements avec ces gens-là, en plus d'avec les gardes côtiers américains, d'autre part.
Notre souveraineté réduite à une peau de chagrin, il ne restera plus qu'à ... . Que nous restera-t-il, finalement? On n'aura plus grand pouvoir de négociation, d'un côté ou de l'autre.
Sylvain L'Artriste
mardi, juin 10, 2008
Rapport Bouchard & Taylor : les Métis doivent prendre note
Dans un texte fleuve qui n'a rien à envier aux discours lancinants et pénibles du chantre de la révolution cubaine, Gérard Bouchard, la première moitié de la plume qui a signé l'historique rapport d'une Commission sensée réunir en une seule coupe multiculturelle (pardon, « interculturelle » !) ; l'auteur du livre « La nation québécoise au futur et au passé », l'inventeur de la «nation civique québécoise », en remet sur l'enclume de ses contradictions. Tous les quotidiens du Québec en sont témoins, de même que les oiseaux de la rivière Mingan de Jos Monferrand jusqu'à la Bitte à Tibi.
La faute à Voltaire
Encore une fois, les « québécois de souche canadienne-française » (sic) n'ont rien compris. Et s'ils n'ont rien compris, c'est que la faute est imputable aux leaders nationalistes qui ont gommé son rapport. En référant aux Canadiens français qui refusent cette assimilation, il écrit donc : « on doit tout de même admettre que cette nouvelle identité [franco-québécoise] ne peut pas être imposée à qui que ce soit. Chaque citoyen a le droit, s'il le désire, de conserver une référence à ses racines et de cultiver une appartenance ou une identité particulière, parallèle à l'autre et en relation avec elle... »
En voilà déjà beaucoup. Je me demande réellement si l'auteur est conscient de ce qu'il a écrit dans son rapport. En le lisant, j'ai l'impression de vivre sur une autre planète ! D'abord, il est faux de dire que ce sont les leaders nationalistes qui ont produit ce résultat. Et c'est réduire à bien peu l'ampleur du tollé de contestation puisque les Indiens (relisez Max Gros Louis) se sont immédiatement inscrits en faux contre le rapport. Puisque les Métis dont on ne daigne même pas souligner les deux passages à la commission le dénoncent eux-aussi (relisez mes propres textes et ceux des autres leaders du Québec). Puisque des milliers de Canadiens français qui ne sont ni nationalistes ni séparatistes ont vertement dénoncé le fait d'avoir été réduits à l'état d'une sous-culture du Québec moderne, des reculés qui n'ont plus que la pipe de plâtre et la ceinture fléchée comme lieux communs.
Faut-il être bouché à ce point pour imaginer qu'il n'y a que les nationalistes québécois qui ont quelque chose à perdre dans ce rapport qui bafoue le premier fait fondateur du Québec ? À sçavoir les Canadiens français et les Métis qui représentent encore tout près de 70% de la population du Québec !
Less Métis devront prendre note
Dans sa furibonde sortie, le co-auteur du Rapport soutient donc formellement l'idée que « chaque citoyen a le droit, s'il le désire, de conserver une référence à ses racines... ». Celle-là, au nom de tous les Métis dont il a contesté lui-même l'existence dans les journaux du Saguenay, je la retiens au rôle du débat qui s'ensuit dans notre société. En tant qu'Autochtone (Métis), je suis entièrement d'accord sur ce point. Et je suggère justement aux Canadiens français et aux Métis qui se sentent gommés et rétrécis dans le sidérant Rapport, de ne pas perdre de vue cette citation. C'est justement là le fondement de la crise qu'il a portée à un niveau inégalée depuis le Rapport Durham. Je crois que le co-auteur Bouchard n'est pas tout à fait conscient que le feu d'herbe qu'il a allumé dans ses écrits de l'après-référendum est en train de devenir un feu de brousse où plus personne n'a le contrôle, et qu'il en faudra encore bien peu pour qu'il s'étende à la forêt toute entière.
Notre homme se demande également : « pourquoi, suivant la même logique, serait-il condamnable de parler de Québécois d'origine canadienne-française, en particulier à l'intention de ceux qui tiennent à cette référence ? L'expression est parfaitement neutre, précise et équitable, et elle correspond à la réalité historique. » Je crois qu'il n'a pas compris que c'est justement là où le bât blesse. Les Canadiens français et les Métis n'en veulent tout simplement pas de ce rapetissement. Et c'est justement parce que cette notion les neutralise dans un miasme ethnoculturel sans âme dans lequel ils n'ont plus de références à leur histoire, à leur lutte, à leurs espoirs et à leur identité-propre qu'ils crient à l'imposture.
S'il y a débordement, comme il le dit craindre, le maître d'oeuvre de la « nation civique franco-québécoise » doit comprendre qu'il n'y est pas tout à fait pour rien. Et Jean Charest ne pourra s'en prendre qu'à lui d'avoir donné une baguette de sorcier à un apprentis qui n'est toujours pas foutu de comprendre qu'il a pris la baguette par le mauvais bout...
Akakia
La faute à Voltaire
Encore une fois, les « québécois de souche canadienne-française » (sic) n'ont rien compris. Et s'ils n'ont rien compris, c'est que la faute est imputable aux leaders nationalistes qui ont gommé son rapport. En référant aux Canadiens français qui refusent cette assimilation, il écrit donc : « on doit tout de même admettre que cette nouvelle identité [franco-québécoise] ne peut pas être imposée à qui que ce soit. Chaque citoyen a le droit, s'il le désire, de conserver une référence à ses racines et de cultiver une appartenance ou une identité particulière, parallèle à l'autre et en relation avec elle... »
En voilà déjà beaucoup. Je me demande réellement si l'auteur est conscient de ce qu'il a écrit dans son rapport. En le lisant, j'ai l'impression de vivre sur une autre planète ! D'abord, il est faux de dire que ce sont les leaders nationalistes qui ont produit ce résultat. Et c'est réduire à bien peu l'ampleur du tollé de contestation puisque les Indiens (relisez Max Gros Louis) se sont immédiatement inscrits en faux contre le rapport. Puisque les Métis dont on ne daigne même pas souligner les deux passages à la commission le dénoncent eux-aussi (relisez mes propres textes et ceux des autres leaders du Québec). Puisque des milliers de Canadiens français qui ne sont ni nationalistes ni séparatistes ont vertement dénoncé le fait d'avoir été réduits à l'état d'une sous-culture du Québec moderne, des reculés qui n'ont plus que la pipe de plâtre et la ceinture fléchée comme lieux communs.
Faut-il être bouché à ce point pour imaginer qu'il n'y a que les nationalistes québécois qui ont quelque chose à perdre dans ce rapport qui bafoue le premier fait fondateur du Québec ? À sçavoir les Canadiens français et les Métis qui représentent encore tout près de 70% de la population du Québec !
Less Métis devront prendre note
Dans sa furibonde sortie, le co-auteur du Rapport soutient donc formellement l'idée que « chaque citoyen a le droit, s'il le désire, de conserver une référence à ses racines... ». Celle-là, au nom de tous les Métis dont il a contesté lui-même l'existence dans les journaux du Saguenay, je la retiens au rôle du débat qui s'ensuit dans notre société. En tant qu'Autochtone (Métis), je suis entièrement d'accord sur ce point. Et je suggère justement aux Canadiens français et aux Métis qui se sentent gommés et rétrécis dans le sidérant Rapport, de ne pas perdre de vue cette citation. C'est justement là le fondement de la crise qu'il a portée à un niveau inégalée depuis le Rapport Durham. Je crois que le co-auteur Bouchard n'est pas tout à fait conscient que le feu d'herbe qu'il a allumé dans ses écrits de l'après-référendum est en train de devenir un feu de brousse où plus personne n'a le contrôle, et qu'il en faudra encore bien peu pour qu'il s'étende à la forêt toute entière.
Notre homme se demande également : « pourquoi, suivant la même logique, serait-il condamnable de parler de Québécois d'origine canadienne-française, en particulier à l'intention de ceux qui tiennent à cette référence ? L'expression est parfaitement neutre, précise et équitable, et elle correspond à la réalité historique. » Je crois qu'il n'a pas compris que c'est justement là où le bât blesse. Les Canadiens français et les Métis n'en veulent tout simplement pas de ce rapetissement. Et c'est justement parce que cette notion les neutralise dans un miasme ethnoculturel sans âme dans lequel ils n'ont plus de références à leur histoire, à leur lutte, à leurs espoirs et à leur identité-propre qu'ils crient à l'imposture.
S'il y a débordement, comme il le dit craindre, le maître d'oeuvre de la « nation civique franco-québécoise » doit comprendre qu'il n'y est pas tout à fait pour rien. Et Jean Charest ne pourra s'en prendre qu'à lui d'avoir donné une baguette de sorcier à un apprentis qui n'est toujours pas foutu de comprendre qu'il a pris la baguette par le mauvais bout...
Akakia
samedi, juin 07, 2008
Les Métis, à l'honneur dans Le Devoir...
Le texte mérite le détour.
Les Métis, ce peuple méprisé par les gouvernements, par les Indiens et par les Canadiens. Les Métis, le peuple fondateur sans qui l'Amérique ne serait pas ce qu'elle est. Les Métis, ces « hommes libres » oubliés qui ont arpenté l'Amérique dans tous les sens depuis les premiers contacts. Les Métis, ceux-là qui sont à l'origine du mythe fondateur Américain et qui ont inspiré le slogan révolutionnaire de « liberté, égalité fraternité », trouvent enfin un premier écho dans la grande presse montréalaise qui nous salue dans un texte de Denis Lord.
À lire, pour vous donner le goût de poursuivre la lutte pour la Liberté, l'égalité, la fraternité, qui ne va pas sans le respect et la justice...
Russel Bouchard
« Les Métis de l'Est - Ils sont 291 000 sans territoire propre
Denis Lord
Édition du samedi 07 et du dimanche 08 juin 2008
Mots clés : Raymond Cyr, Les Métis de l'Est, Festival et fête, Autochtone, Québec (province)
« Être un Métis, c'est une culture, pas juste un p'tit mélange de sang rouge et blanc »
En avril dernier, des producteurs de la Beauce ont exigé d'être exclus du plan conjoint de mise en marché du sirop d'érable, sous prétexte de leurs origines. Le même mois, la Cour supérieure a rejeté la demande d'un groupe voulant participer aux négociations territoriales entre le gouvernement québécois et les Innus, concernant l'Entente commune au Saguenay. Le point commun entre ces revendications? Elles ont été émises par des Métis du Québec, qui réclament des droits analogues à ceux des autochtones. Un dossier embrouillé et brûlant.
Le terme de «Métis» évoque irrémédiablement Louis Riel et ses concitoyens de la rivière Rouge, amalgame de descendants de coureurs des bois canadiens-français et de Cris, Saulteux et Ojibwas. Mais la réalité est autrement plus complexe. Dans la plupart des provinces canadiennes, des communautés s'identifient elles aussi comme des regroupements de Métis. Quelque 291 000 personnes se sont réclamées de cette identité lors du recensement de 2001. Le gouvernement canadien reconnaît l'existence de 80 communautés métisses dans le pays sans pour autant leur accorder les mêmes droits qu'aux autochtones.
Origines mixtes, peuple singulier
«Être un Métis, c'est une culture, pas juste un p'tit mélange de sang rouge et blanc.» C'est Raymond Cyr qui s'exprime ainsi, aujourd'hui représentant des Métis de l'Estrie, après avoir grandi dans les monts Chic-Chocs, dans une communauté issue de «l'union des Euro-Canadiens avec des Montagnais, des Abénakis et des Malécites».
«On nous donnait différents noms, comme les hommes-capitaines. D'abord, parce qu'une partie de nos ancêtres étaient des Blancs qui avaient fui les bateaux. Ils étaient renommés poilus, méfiants et dangereux parce qu'ils avaient peur d'être repris.» Autre raison: chaque homme pouvait être un chef, l'un pour la chasse, un autre pour l'établissement d'un camp, par exemple. «Nous avons incorporé l'esprit rationnel des Blancs à nos valeurs spirituelles, dit Raymond Cyr. Nous sommes reconnus pour notre sens des affaires, mais aussi nous parlons aux bêtes que nous tuons. Nous croyons aux songes, à la prémonition.»
Dominique Côté, juriste et généalogiste, abonde dans le même sens. «Le concept de métis se vit très peu par le sang, dit-elle, même si on doit descendre d'une lignée autochtone. Ce sont les us et les coutumes qui importent.» Dominique Côté est d'origine française mais aussi abénakise, huronne, algonquine et micmac. Elle fait partie de la communauté des Antayas -- «celui qui a marié une sauvagesse» -- située en Beauce. Sa culture, dit-elle, se démarque par la spiritualité, les traditions, l'enseignement des aînés.
Rencontre historique
Le Québec abriterait plus de 15 000 Métis disséminés entre sept communautés historiques. Pour la première fois, les 20, 21 et 22, ceux de la Gaspésie, de la Beauce et de l'Estrie, de l'Abitibi aussi, d'ailleurs encore, se réuniront à Jonquière pour un pow-wow chez la communauté métisse du domaine du Roy et de la seigneurie de Mingan (CMDRSM), deux immenses territoires sur lesquels les Métis réclament des droits. «Chicoutimi, affirme Jean-René Tremblay, chef de la CMDRSM, était jadis un poste de traite métis privilégié, avec sa chapelle et son cimetière, qui ont été détruits par l'État moderne. Des Amérindiens ici, dès 1710, il n'y en avait plus.»
Nombre d'Amérindiens ne reconnaissent pas l'identité métisse. Il y a quelques années, un groupe de pression, l'Alliance autochtone du Québec, a refusé d'arborer le drapeau métis et de jouer l'hymne métis lors des réunions. En Gaspésie, Micmacs et Métis se sont opposés dans le dossier de la création de la pourvoirie Badwin. «Pourtant, affirme Raymond Cyr, les réserves se sont formées à partir du bassin de population des Métis. Les habitants des réserves de Maria, de Restigouche et de Gaspé sont aussi métis que nous. Sans nous, ils auraient perdu leurs traditions. Mon cousin a montré à trapper à ceux de Maria.»
Le même problème de reconnaissance se reproduit entre Métis de l'Ouest et Métis du Québec. Le Metis National Council, formé de représentants des organisations provinciales de l'Ouest, ne reconnaît pas l'existence des Métis de l'Est. La seule organisation à le faire est l'Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba (UNM). Le président de la plus ancienne organisation du genre, Gabriel Dufault, sera d'ailleurs présent au pow-wow de Jonquière, une première. Encore une fois, Raymond Cyr s'insurge. «Les Métis de l'Ouest sont originaires de l'Est, sauf les Métis écossais.» «C'est une hypothèse qu'on examine», commente prudemment Fabien Tremblay, qui étudie l'ethnogenèse des communautés de la Gaspésie et de l'Abitibi pour la Chaire de recherche sur l'identité métisse.
Revendications
Jusqu'à aujourd'hui, les communautés métisses du Québec n'ont pas fait front commun dans leurs revendications. Celles-ci demeurent locales. On parle essentiellement de la reconnaissance de droits ancestraux, comme la chasse et la pêche, la consultation sur l'utilisation du territoire. «Nous aurions le droit à la cogestion, remarque Raymond Cyr, de dire non à la pêche abusive, à la coupe à blanc.» Le représentant des Métis de l'Estrie s'insurge contre la monoculture dans la reforestation des Chic-Chocs, qui appauvrit la faune.
La CMDRSM va beaucoup plus loin. Elle revendique le titre foncier d'un territoire allant, d'est en ouest, des Éboulements au Labrador, et, du sud au nord, du fleuve Saint-Laurent à la ligne de partage des eaux avec le bassin hydraulique de la baie James.
Toutes ces revendications se heurtent à un obstacle de taille: les Métis de l'Est n'ont pas d'existence juridique aux niveaux provincial et fédéral. «Lors du rapatriement de la Constitution en 1982, explique Fabien Tremblay, on a rajouté les Métis aux peuples inclus dans l'article 35, les Inuits et les autochtones, sans pour autant spécifier qui ils sont.»
«Nous reconnaissons des groupes représentant les intérêts des Métis, précise Fred Caron, sous-ministre adjoint au bureau de l'Interlocuteur auprès des Métis et des Indiens non inscrits, mais pas les Métis eux-mêmes, même s'ils ont droit à certaines subventions.» Aucun groupe représentant les intérêts des Métis du Québec n'est reconnu.
L'arrêt PowleyLa reconnaissance des Métis passe d'abord et avant tout par le ministère de la Justice, qui d'ailleurs a investi 24 millions de dollars en 2004 dans une enquête menée sur cette réalité. Cette enquête a fait suite au jugement Powley de la Cour suprême, qui a ouvert une brèche, sinon la boîte de Pandore, dans la jurisprudence canadienne. En 1993, Steve et Roddy Charles Powley, deux Métis de Sault Ste. Marie ont été accusés d'avoir violé la Lo
i sur la chasse et la pêche de l'Ontario pour avoir tué un orignal. Lors de leur défense, ils ont invoqué l'article 35 de la Loi constitutionnelle. Il a fallu dix ans avant qu'ils ne gagnent leur cause devant la Cour suprême. «Les Métis de Sault Ste. Marie sont les seuls Métis canadiens à bénéficier de droits autochtones au sens de la Loi sur les Indiens», explique Denis Gagnon, directeur de la Chaire de recherche sur l'identité métisse.
Mais l'arrêt Powley ne définit pas juridiquement, lui non plus, le terme de «Métis». Il se limite à des directives sur d'éventuelles revendications: l'appartenance à une communauté possédant un degré de continuité et de stabilité rattaché à un lieu précis; cette communauté doit avoir vu le jour avant que les institutions politiques européennes et l'influence des colons ne soient devenues prédominantes. Le mot «Métis» ne vise pas toutes les personnes d'ascendance mixte amérindienne et européenne.
«Le gouvernement canadien a judiciarisé le phénomène identitaire, objecte un intervenant, et il veut dissuader les Métis de tenter de faire reconnaître leurs droits en faisant traîner les causes d'une cour à l'autre.» N'empêche. Selon Fabien Tremblay, avec le précédent créé par le jugement Powley, la zone grise politique et juridique sera de plus en plus balisée. Powley a ouvert un espace juridique qui est devenu politique puis identitaire. Le mouvement d'affirmation métis a gagné tout le Québec.
Selon Denis Gagnon, après un siècle de négation de leur existence, les Métis font aujourd'hui face au paradoxe de la définition de leur identité. «La reconnaissance de leur existence et de leurs droits est juridiquement reliée à sa définition et cette définition identitaire signifie l'extinction de leur statut à moyen terme, en raison des intermariages qu'ils contracteront d'ici les prochaines années. Les enfants des Métis qui se seront métissés au-delà d'une génération perdront leur statut, comme c'est le cas pour les Amérindiens. Cet enjeu, dont les Amérindiens sont bien conscients, n'est pas encore soulevé par les associations métisses et demeure un danger pour la survie de leur identité.»
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Collaborateur du Devoir»
Les Métis, ce peuple méprisé par les gouvernements, par les Indiens et par les Canadiens. Les Métis, le peuple fondateur sans qui l'Amérique ne serait pas ce qu'elle est. Les Métis, ces « hommes libres » oubliés qui ont arpenté l'Amérique dans tous les sens depuis les premiers contacts. Les Métis, ceux-là qui sont à l'origine du mythe fondateur Américain et qui ont inspiré le slogan révolutionnaire de « liberté, égalité fraternité », trouvent enfin un premier écho dans la grande presse montréalaise qui nous salue dans un texte de Denis Lord.
À lire, pour vous donner le goût de poursuivre la lutte pour la Liberté, l'égalité, la fraternité, qui ne va pas sans le respect et la justice...
Russel Bouchard
« Les Métis de l'Est - Ils sont 291 000 sans territoire propre
Denis Lord
Édition du samedi 07 et du dimanche 08 juin 2008
Mots clés : Raymond Cyr, Les Métis de l'Est, Festival et fête, Autochtone, Québec (province)
« Être un Métis, c'est une culture, pas juste un p'tit mélange de sang rouge et blanc »
En avril dernier, des producteurs de la Beauce ont exigé d'être exclus du plan conjoint de mise en marché du sirop d'érable, sous prétexte de leurs origines. Le même mois, la Cour supérieure a rejeté la demande d'un groupe voulant participer aux négociations territoriales entre le gouvernement québécois et les Innus, concernant l'Entente commune au Saguenay. Le point commun entre ces revendications? Elles ont été émises par des Métis du Québec, qui réclament des droits analogues à ceux des autochtones. Un dossier embrouillé et brûlant.
Le terme de «Métis» évoque irrémédiablement Louis Riel et ses concitoyens de la rivière Rouge, amalgame de descendants de coureurs des bois canadiens-français et de Cris, Saulteux et Ojibwas. Mais la réalité est autrement plus complexe. Dans la plupart des provinces canadiennes, des communautés s'identifient elles aussi comme des regroupements de Métis. Quelque 291 000 personnes se sont réclamées de cette identité lors du recensement de 2001. Le gouvernement canadien reconnaît l'existence de 80 communautés métisses dans le pays sans pour autant leur accorder les mêmes droits qu'aux autochtones.
Origines mixtes, peuple singulier
«Être un Métis, c'est une culture, pas juste un p'tit mélange de sang rouge et blanc.» C'est Raymond Cyr qui s'exprime ainsi, aujourd'hui représentant des Métis de l'Estrie, après avoir grandi dans les monts Chic-Chocs, dans une communauté issue de «l'union des Euro-Canadiens avec des Montagnais, des Abénakis et des Malécites».
«On nous donnait différents noms, comme les hommes-capitaines. D'abord, parce qu'une partie de nos ancêtres étaient des Blancs qui avaient fui les bateaux. Ils étaient renommés poilus, méfiants et dangereux parce qu'ils avaient peur d'être repris.» Autre raison: chaque homme pouvait être un chef, l'un pour la chasse, un autre pour l'établissement d'un camp, par exemple. «Nous avons incorporé l'esprit rationnel des Blancs à nos valeurs spirituelles, dit Raymond Cyr. Nous sommes reconnus pour notre sens des affaires, mais aussi nous parlons aux bêtes que nous tuons. Nous croyons aux songes, à la prémonition.»
Dominique Côté, juriste et généalogiste, abonde dans le même sens. «Le concept de métis se vit très peu par le sang, dit-elle, même si on doit descendre d'une lignée autochtone. Ce sont les us et les coutumes qui importent.» Dominique Côté est d'origine française mais aussi abénakise, huronne, algonquine et micmac. Elle fait partie de la communauté des Antayas -- «celui qui a marié une sauvagesse» -- située en Beauce. Sa culture, dit-elle, se démarque par la spiritualité, les traditions, l'enseignement des aînés.
Rencontre historique
Le Québec abriterait plus de 15 000 Métis disséminés entre sept communautés historiques. Pour la première fois, les 20, 21 et 22, ceux de la Gaspésie, de la Beauce et de l'Estrie, de l'Abitibi aussi, d'ailleurs encore, se réuniront à Jonquière pour un pow-wow chez la communauté métisse du domaine du Roy et de la seigneurie de Mingan (CMDRSM), deux immenses territoires sur lesquels les Métis réclament des droits. «Chicoutimi, affirme Jean-René Tremblay, chef de la CMDRSM, était jadis un poste de traite métis privilégié, avec sa chapelle et son cimetière, qui ont été détruits par l'État moderne. Des Amérindiens ici, dès 1710, il n'y en avait plus.»
Nombre d'Amérindiens ne reconnaissent pas l'identité métisse. Il y a quelques années, un groupe de pression, l'Alliance autochtone du Québec, a refusé d'arborer le drapeau métis et de jouer l'hymne métis lors des réunions. En Gaspésie, Micmacs et Métis se sont opposés dans le dossier de la création de la pourvoirie Badwin. «Pourtant, affirme Raymond Cyr, les réserves se sont formées à partir du bassin de population des Métis. Les habitants des réserves de Maria, de Restigouche et de Gaspé sont aussi métis que nous. Sans nous, ils auraient perdu leurs traditions. Mon cousin a montré à trapper à ceux de Maria.»
Le même problème de reconnaissance se reproduit entre Métis de l'Ouest et Métis du Québec. Le Metis National Council, formé de représentants des organisations provinciales de l'Ouest, ne reconnaît pas l'existence des Métis de l'Est. La seule organisation à le faire est l'Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba (UNM). Le président de la plus ancienne organisation du genre, Gabriel Dufault, sera d'ailleurs présent au pow-wow de Jonquière, une première. Encore une fois, Raymond Cyr s'insurge. «Les Métis de l'Ouest sont originaires de l'Est, sauf les Métis écossais.» «C'est une hypothèse qu'on examine», commente prudemment Fabien Tremblay, qui étudie l'ethnogenèse des communautés de la Gaspésie et de l'Abitibi pour la Chaire de recherche sur l'identité métisse.
Revendications
Jusqu'à aujourd'hui, les communautés métisses du Québec n'ont pas fait front commun dans leurs revendications. Celles-ci demeurent locales. On parle essentiellement de la reconnaissance de droits ancestraux, comme la chasse et la pêche, la consultation sur l'utilisation du territoire. «Nous aurions le droit à la cogestion, remarque Raymond Cyr, de dire non à la pêche abusive, à la coupe à blanc.» Le représentant des Métis de l'Estrie s'insurge contre la monoculture dans la reforestation des Chic-Chocs, qui appauvrit la faune.
La CMDRSM va beaucoup plus loin. Elle revendique le titre foncier d'un territoire allant, d'est en ouest, des Éboulements au Labrador, et, du sud au nord, du fleuve Saint-Laurent à la ligne de partage des eaux avec le bassin hydraulique de la baie James.
Toutes ces revendications se heurtent à un obstacle de taille: les Métis de l'Est n'ont pas d'existence juridique aux niveaux provincial et fédéral. «Lors du rapatriement de la Constitution en 1982, explique Fabien Tremblay, on a rajouté les Métis aux peuples inclus dans l'article 35, les Inuits et les autochtones, sans pour autant spécifier qui ils sont.»
«Nous reconnaissons des groupes représentant les intérêts des Métis, précise Fred Caron, sous-ministre adjoint au bureau de l'Interlocuteur auprès des Métis et des Indiens non inscrits, mais pas les Métis eux-mêmes, même s'ils ont droit à certaines subventions.» Aucun groupe représentant les intérêts des Métis du Québec n'est reconnu.
L'arrêt PowleyLa reconnaissance des Métis passe d'abord et avant tout par le ministère de la Justice, qui d'ailleurs a investi 24 millions de dollars en 2004 dans une enquête menée sur cette réalité. Cette enquête a fait suite au jugement Powley de la Cour suprême, qui a ouvert une brèche, sinon la boîte de Pandore, dans la jurisprudence canadienne. En 1993, Steve et Roddy Charles Powley, deux Métis de Sault Ste. Marie ont été accusés d'avoir violé la Lo
i sur la chasse et la pêche de l'Ontario pour avoir tué un orignal. Lors de leur défense, ils ont invoqué l'article 35 de la Loi constitutionnelle. Il a fallu dix ans avant qu'ils ne gagnent leur cause devant la Cour suprême. «Les Métis de Sault Ste. Marie sont les seuls Métis canadiens à bénéficier de droits autochtones au sens de la Loi sur les Indiens», explique Denis Gagnon, directeur de la Chaire de recherche sur l'identité métisse.
Mais l'arrêt Powley ne définit pas juridiquement, lui non plus, le terme de «Métis». Il se limite à des directives sur d'éventuelles revendications: l'appartenance à une communauté possédant un degré de continuité et de stabilité rattaché à un lieu précis; cette communauté doit avoir vu le jour avant que les institutions politiques européennes et l'influence des colons ne soient devenues prédominantes. Le mot «Métis» ne vise pas toutes les personnes d'ascendance mixte amérindienne et européenne.
«Le gouvernement canadien a judiciarisé le phénomène identitaire, objecte un intervenant, et il veut dissuader les Métis de tenter de faire reconnaître leurs droits en faisant traîner les causes d'une cour à l'autre.» N'empêche. Selon Fabien Tremblay, avec le précédent créé par le jugement Powley, la zone grise politique et juridique sera de plus en plus balisée. Powley a ouvert un espace juridique qui est devenu politique puis identitaire. Le mouvement d'affirmation métis a gagné tout le Québec.
Selon Denis Gagnon, après un siècle de négation de leur existence, les Métis font aujourd'hui face au paradoxe de la définition de leur identité. «La reconnaissance de leur existence et de leurs droits est juridiquement reliée à sa définition et cette définition identitaire signifie l'extinction de leur statut à moyen terme, en raison des intermariages qu'ils contracteront d'ici les prochaines années. Les enfants des Métis qui se seront métissés au-delà d'une génération perdront leur statut, comme c'est le cas pour les Amérindiens. Cet enjeu, dont les Amérindiens sont bien conscients, n'est pas encore soulevé par les associations métisses et demeure un danger pour la survie de leur identité.»
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