mercredi, juin 14, 2006

Benoît Bouchard, le nouveau Jedy fédéral à la table de négociations de l'Approche commune

« Il est préférable de signer une mauvaise entente avec les Ilnutsh que d'aller en procès contre eux. (Benoît Bouchard, 18 février 2006) »

La nouvelle est toute fraîche. L'encre délébile du journal Le Quotidien qui l'annonce ce matin, 14 juin, juste à côté des faits divers et très anodins, jette encore ses parfums sur le début d'une journée qui n'en demandait pas tant. Les Saguenéens qui croyaient que l'épitaphe de l'Approche commune n'avait plus qu'à être déposée au cimetière des projets gouvernementaux morts au feuilleton, en seront quittes pour une bonne déception. En effet, Benoît Bouchard (aucun lien de parenté, ni de près ni de loin, avec le signataire de la présente), l'ex-ministre conservateur sous Brian Mulroney (qui fut le seul premier ministre et député de l'histoire de ce pays, coupable d'avoir signé l'acte de décès de sa propre ville, Schefferville) ; Benoît Bouchard, l'homme fort de Roberval, vient d'être nommé négociateur fédéral en chef pour les revendications territoriales globales et d'autonomie gouvernementale avec les Ilnutsh. On se rappellera à cet effet que l'illustre frère d'armes de Lucien Bouchard (l'homme de tous les partis, mais sans conviction) avait été nommé par Québec (le Parti libéral de M. Charest), en décembre 2003, représentant des régions du Québec. Heureux comme le paon de la fable, mais nullement conscient des lourdes attentes pesant sur lui, il nous avait alors promis d'être la « courroi de transmission » des préoccupations des régionaux hostiles à l'entente. Il avait été nommé à ce titre, rappelons-le... « pour apaiser les tensions chez les populations blanches de la Côte-Nord et du Saguenay–Lac-Saint-Jean » (Le Soleil, 12 décembre 2003).

N'ayant pas réussi à tisser le lien de confiance avec la dissidence majoritaire du Saguenay–Côte-Nord et avec les Métis qui l'ont rencontré pour lui demander d'intercéder en leur faveur auprès de Québec afin qu'ils puissent obtenir une chaise à la table des négociations, ayant échoué sur toute la ligne à apaiser les ressentiments populaires entre Blancs et Ilnutsh, entre Métis et gouvernements, entre Roberval et Saguenay, entre le Lac-Saint-Jean et le Saguenay ; et n'ayant réussi qu'à semer la confusion à chacune de ses interventions publiques —ce qui est une réussite dans cette sorte de commerce—, il était donc normal que le digne fonctionnaire, l'ex-ambassadeur du Canada à Paris, soit récupéré par le nouveau gouvernement conservateur à Ottawa qui l'a promu au plus haut rang de cet échiquier.

Le fait est d'autant plus discutable et d'autant plus équivoque, qu'avant M. Bouchard (qui refuse obstinément de reconnaître la réalité métisse de sa région), il y avait à ce titre, à la tête de la négociation fédérale, un certain M. André Maltais, devenu pour sa part et depuis lors négociateur en chef pour le gouvernement du Québec, en remplacement de Louis Bernard, le concepteur de ce fameux traité concocté par le PQ, de connivence avec le BLOC, les gouvernements fédéral et provincial. Et ce jeu de chiffonniers ne serait pas complet si j'omettais de préciser que du côté ilnut, on est passé d'un chef à l'autre (M. Moar a laissé sa place à M. Dominique), le négociateur Rémy Kurtness est parti en claquant la porte (pour être remplacé par M. Carl Nepton) tout en prenant soin de ne pas la verrouiller (au cas où !).

À cette étape des négociations, alors que les Métis n'ont toujours pas reçu le moindre signe d'ouverture de part et d'autre de la fameuse table de négociations, on se demande encore de quelle manière il faudra aux historiens pour démêler l'écheveau de cette saga kafkaïenne qui a fini par devenir le problème plutôt que la solution, un problème impérieux dont il nous faut aujourd'hui nous extirper...

Russel Bouchard
Le Métis

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