mardi, février 27, 2007

Un jugement de la plus haute Cour de l'Alberta fait avancer d'un autre pas la cause des Métis canadiens — Félicitations et merci !

On me pardonnera cet accroc à ce point de rencontre de la francosphère, mais la nouvelle, sortie le mois dernier, est suffisamment importante pour justifier l'exception. En effet, dans un jugement historique tombé le 22 janvier, la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta a décidé de donner raison aux Métis de cette province et de contraindre le gouvernement à prendre des disposition pour protéger leur culture et leurs traditions en vertu du jugement Powley.

Ce jugement était inévitable. Il devrait inciter les Métis des autres provinces, dont ceux de la Communauté Métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, à poursuivre leurs démarches d'affirmation perpétuellement confrontée à l'étroitesse d'esprit d'un gouvernement entêté qui poursuit sa vieille politique de déni mis de l'avant dans une vieille loi éminemment raciste datant du milieu du siècle dernier (à l'année 1851 pour être plus précis). En ce qui concerne justement les Métis de la CMDRSM, j'en profite pour rappeler aux visiteurs et aux habitués de ce blogue consacré aux Métis de la Boréalie, qu'une première rencontre devant les tribunaux du Québec est justement prévue le 5 mars prochain, dans l'affaire controversée de L'Approche commune.

Merci à Ismène Toussaint, de nous avoir fait parvenir cette nouvelle

Russel Bouchard


Kelly Decision in Alberta a Big Win for Metis Nation
Friday, January 26 2007
Winnipeg, Manitoba - This week’s January 22, 2007, Court of Queen’s Bench of Alberta decision by Mr. Justice Verville is a victory for the whole of the Metis Nation.

In his judgment, Justice Verville overturned a lower court decision, setting aside the conviction of Mr. Kip Kelly and granting a stay. Alberta Metis Citizens harvesting within the terms of the Interim Metis Harvesting Agreement (IMHA) can rely on the agreement as a defense to charges against them by the Alberta Government.

After reaching agreement with Metis Nation of Alberta, the Alberta Government failed to make the IMHA a part of the regulatory system, leaving the agreement technically unenforceable. Despite this, Mr. Justice Verville stated that a conviction “would shock the conscience of the community and bring the administration of justice into disrepute.” By overturning the conviction and granting a stay, it has become, in effect, enforceable.

In his view the Metis Community was entitled to assume the IMHA was binding on the Crown. Governments must uphold the honour of the Crown and consult and accommodate Metis rights. He agreed that the IMHA was entered into as an attempt to fulfill the Alberta Government’s constitutional obligations and in keeping with the honour of the Crown.

Mr. Justice Verville stated that the Government of Alberta continues to have a “constitutional imperative” to deal with the Powley Decision and the Metis Rights recognized by that decision. Considering Alberta’s knowledge of Metis rights asserted in the province, he made it clear that the Government has a constitutional obligation to accommodate undefined Metis harvesting rights in that province.

“Here in Manitoba, the birthplace of the Metis Nation, our provincial government has not accommodated Metis harvesting rights in any way to reflect the Powley Decision,” explained Manitoba Metis Federation (MMF) President David Chartrand. “In fact, Metis continue to be harassed and charged for practicing our culture and feeding our families in our traditional ways. The Manitoba Government also refuses to consult and accommodate the Manitoba Metis Community in natural resource developments.”

“Mr. Justice Verville has indicated that MNA and the Alberta Government are on the right track by coming to a negotiated agreement,” President Chartrand went on to say. “He recognized this type of agreement can avoid the very high costs and heavy burdens the Metis and the courts can incur by having going to trial over and over again to prove our rights. As taxpayers we have to ask why Manitoba wastes our tax dollars by taking the Metis to court.”

Explaining the province-wide nature of the IMHA, Mr. Kelly’s lawyers said the Powley and Blais Decisions did not suggest that Metis rights are geographically more restrictive than other Aboriginal peoples. Based on these earlier cases, Mr. Justice wrote that Metis rights are communal and there is no arbitrary limit on the geographical area which may be encompassed by a harvesting right, and that it is determined by the historical facts rather than the identification of a limited locality.

“This decision clearly has implications here in Manitoba,” said President Chartrand. “It challenges the Manitoba Government’s person-by-person, village-by-village, acre-by-acre approach in the courts to recognize Metis harvesters and Metis harvesting lands.” Historically our Community and our territory extended across the province. This remains true today.”

“This decision indicates that a consultation, negotiation, and partnership approach is needed in the Post-Powley reality,” explained President Chartrand. “The courts are recognizing that the Metis must be partners at the table to accommodate our rights. We welcome working with governments and industry for the benefit of our community and indeed all Manitobans.”

“This decision is a great win not only for Metis Citizens in Alberta but indeed for the Metis Nation across our Homeland,” said President Chartrand. “I want to congratulate Mr. Kelly and the Metis Nation of Alberta on their success. I also want to thank the Metis National Council and our Metis Legal Counsel for their support in bringing justice to our People.”

mercredi, février 21, 2007

Campagne électorale et budget — Les Métis ne doivent pas hésiter à faire entendre leurs voix

Métis et engagés du poste de traite de Godbout, Côte-Nord du Saint-Laurent, en train de saler la morue. Photo : L'Opinion Publique, 1879.


À la veille du déclenchement officiel de la campagne électorale au Québec, le gouvernement de Jean Charest reconnaît enfin la valeur des régions et entend leur donner un coup de pouce pour leur permettre de se sortir du marasme dans lequel elles sont empêtrées. On évitera de tergiverser sur les quelque 825 M$ saupoudrés dans différents programmes sur une période de cinq ans, pour ne s'arrêter que sur la signification profonde de ce qui constitue, en principe et à mon point de vue, un virage à 180 degrés.

Ainsi donc, déclare officiellement le ministre Odet dans ce qui sera son dernier budget, « la nouvelle stratégie de développement des régions vient appuyer notre action pour favoriser l'autonomie régionale. Nous mettons des moyens financiers additionnels sous le contrôle de toutes les régions pour qu'elles puissent pleinement jouer le rôle qui leur revient dans leur développement. » À elle seule, la ville de Montréal recevra, au cours des cinq prochaines années, une aide supplémentaire de 140 M$ pour ses grands projets ; ce geste officiel lui confère le statut de « ville région », au même titre que la Côte-Nord, la Mauricie ou le Saguenay–Lac-Saint-Jean, et un copieux avantage que ne reçoivent pas les autres villes importantes du Québec, comme Sherbrooke, Saguenay, Trois-Rivières.

Quoi qu'en disent les chefs de partis, les chambres de commerce et les syndicats ; quoi qu'en disent tous ces gens, les grands titres de ce budget, si électoral soit-il, marquent, à eux seuls, l'échec et la faillite de la politique de développement régional du Québec instaurée au début des années 1970, par le gouvernement de Robert Bourassa, et poursuivie par tous les gouvernements successifs en dépit des indices criants d'un effondrement national préparé de longue date et dont nous ne sommes pas prêts de sortir !

Si les observateur$ « déluré$ » (!) du Québec n'ont pas encore saisi l'importance fondamentale de cette annonce officielle, parce que trop occupés à comptabiliser les retombées monétaires sonnantes et trébuchantes pour la part qui leur revient en propre, considérons que le chef des Premières Nations du Québec, M. Ghislain Picard, a compris, lui, que son peuple risquait d'y perdre au change. Même s'il continue de faire de la pousse en parlant erronément au nom de tous les « autochtones » du Québec, ce qui n'est pas le cas puisque les Inuits et les Métis nourrissent leur propre programme politique, le grand-chef Picard a raison de se surprendre de ce qui constitue, à ses yeux, une perte de pouvoirs au profit des régions. Ainsi, dit-il en entrevue, « quand on parle de régionalisation, on parle de plus grands pouvoirs des régions dans l'exploitation des ressources naturelles. On n'a pas le choix de faire entendre notre voix à ce sujet. Le développement passe par les communautés que nous représentons. Le territoire dont on parle est visé par un titre autochtone ».

Par contre, ce que ne dit pas M. Picard, c'est que le titre autochtone n'est pas un titre réservé aux seuls Indiens et qu'il s'y trouve également des Inuits et des Métis. Cette confusion délibérément entretenue doit être dénoncée. Tôt ou tard, M. Picard devra reconnaître, pour sa part, que si les Indiens ont des droits inaliénables sur de grandes portions du territoire québécois et sur ses ressources naturelles, les Métis, eux aussi, nourrissent des attentes similaires. Que le gouvernement démissionnaire de Jean Charest reconnaisse enfin la valeur intrinsèque de toutes les régions du Québec, est un avènement en soi qu'il faut saluer haut et fort. Mais que M. Picard, tout comme M. Charest, prennent note que le peuple Métis du Québec a lui aussi des valeurs, des besoins et des aspirations profondes qui méritent d'être considérés dans un futur prévisible.

Pour cette raison, les Métis du Québec doivent prendre le temps de faire entendre leurs voix dans la campagne électorale qui s'amorce. Peu importe s'ils vont voter ou pour qui ils entendent voter, il y a là une tribune publique exceptionnelle pour affirmer leur réalité et le droit à la dignité humaine qui commence par la reconnaissance de leur propre existence. Sans cette reconnaissance qui commence par l'affirmation du Nous collectif, rien ne sera possible...

Russel Bouchard

dimanche, février 18, 2007

Culture, mariage et amour à la manière du pays...



De tout temps, les observateurs qui ont parcouru les vastes étendues du continent nord-américain ont été unanimes pour décrire à quel point les autochtones aimaient leurs enfants et à quel point l'amour était un facteur déterminant dans la qualité des unions. Les Métis, écrit Marcel Giraud dans son fabuleux livre, « rejoignaient l'Indien par leur tempérament émotionnel. Celui-ci s'exprimait [...] dans l'affection exagérée que, à l'exemple des Indiens, ils portaient à leurs enfants ». Chez ces peuples, en effet, le châtiment corporel et la punition n'existaient pas. Pères et mères préférant en cela valoriser l'amour de la vie, de l'honneur et du courage, au grand dam des missionnaires qui, eux, avaient été élevés à coups de règle et de ceinturon.

Si, dans toutes les nations algonquiennes, le chef de famille (chez les Indiens) ou de clan (chez les Métis) détenait l'autorité et se voyait investi du double rôle de protecteur et de pourvoyeur, la femme lui était associée à part entière. Elle exerçait —et exerce toujours— un pouvoir matriarcal incontestable. Elle transmettait les valeurs culturelles, soignait, consolait, trimait dur et perpétuait les gestuels au quotidien.



Jusqu'à ce que les méfaits de la mondialisation surprennent ces gens dans leurs habitudes séculaires, on ne dira jamais assez à quel point l'univers autochtone était empreint de jovialité, de bonheur de vivre et d'amour. Il n'y avait pas plus rieurs qu'eux, témoignent encore siècle après siècle les missionnaires qui les ont côtoyés.

Chez les Métis, l'union entre un homme (en l'occurrence Blanc) et une femme (en l'occurrence « Sauvage », ce qui veut dire d'origine indienne ou métisse) était non seulement un geste d'amour, mais aussi un acte éminemment social contribuant au jeu des alliances familiales et économiques. Avant l'arrivée des missionnaires et des prêtres séculiers, ces unions étaient faites « à la mode du pays », c'est-à-dire selon la tradition indienne du lieu. Dans l'Ouest canadien, ces unions dites à la mode du pays ont perduré jusqu'aux années 1830 environ, jusqu'à ce que la civilisation euro-canadienne et les missionnaires s'y mettent ; alors qu'au Saguenay—Lac-Saint-Jean et sur la Côte-Nord on en retrouve de nombreux témoignages jusqu'à la fin du XIXe siècle.

Russel Bouchard


Photos : Jacques Boily, Saguenay, c. 1950.

Lectures suggérées :
—André, Anne, Je suis une maudite sauvagesse, Leméac, Montréal, 1976.
—Bouchard, Russel, Quatre années dans la vie du poste de traite de Chicoutimi (1800-1804) / Journal de Neil McLaren,
—Ferland, Marcien, Au temps de la prairie / Histoire des Métis de l'Ouest canadien raconté par Auguste Vermette, Blé en poche, Saint-Boniface, 2006.
—Giraud, Marcel, Le Métis canadien, Institut d'Ethnologie, Parie, 1945, 2t.
—Kermoal, Nathalie, Un passé Métis au féminin, Les Éditions Gid, Québec 2006.

samedi, février 17, 2007

L'Approche commune — De propriétaire à locataire !

L'Approche commune – Ou comment devenir locataire dans son propre pays après avoir été propriétaire...


« Ce sont les Blancs qui vont se retrouver dans une réserve enclavée par des Innus, ce sera au tour des Blancs de payer des taxes au gouvernement autochtone. » Guy Bellefleur, négociateur pour les Ilnutsh de l'Est, in Le Soleil, 19 janvier 2002.

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Les discussions sont définitivement rompues entre « Le Regroupement des locataires des terres publiques » (RLTP), qui compte 5500 membres au Québec, dont 1400 au Saguenay–Lac-Saint-Jean, et les Ilnutsh de Mashteuiatsh. Le point de rupture était inévitable, et je vous avouerai que ce qui m'étonne dans cette affaire c'est que ce ne soit pas arrivé plus tôt. Mais comme on dit : mieux vaut tard que jamais ! Et il est heureux que cela se produise plutôt avant qu'après la signature du traité, que la nouvelle courroie de transmission —M. Detroio— souhaite pour l'an prochain. Car lorsque cela sera fait, les règles régissant l'occupation du territoire seront scellées jusqu'à la fin des temps... à moins d'un coup de chaleur populaire que le président du RLTP ne se prive pas d'évoquer.

Selon ce qui ressort des commentaires publiés ce matin par les médias du Saguenay–Lac-Saint-Jean, la haute direction du RLTP ne peut plus accepter de souffrir autant d'arrogance de la part des chefs Ilnutsh, et notamment de celui de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique. Vous pensiez avoir tout vu avec l'affaire d'Hérouxville ? Eh bien détrompez-vous ! Car le pire qui mijote depuis le mois de juillet 2000, n'a pas encore atteint son point d'ébullition. En effet, au cours de la première réunion annuelle du RLTP, tenue cette semaine à Alma, les responsables de l'organisme ont remis une lettre à leurs membres dans laquelle ils ont fustigé les pourparlers sur l'Approche commune et violemment dénoncé les agissements de la communauté ilnut qu'ils disent « immature et manipulatrice ».

Le responsable officiel du dossier de l'Approche commune, M. Réjean Thibeault, n'y va pas par quatre chemins pour dire ce que lui et son groupe pensent des pourparlers, des Ilnutsh et du gouvernement. « Les Ilnutsh sont passés maîtres dans l'art de manipuler les gens, et surtout les politiciens ». L'Approche commune repose sur un principe de base : le temps fait oublier les choses. C'est comme ça qu'ils pensent. Un jour, quand tout le monde aura oublié, ils signeront à leurs avantages, et tout cela aura été fait avec l'approbation de nos gouvernements, dont la seule préoccupation est le droit d'exploiter les ressources naturelles pour faire de l'argent. » Comme cela a été maintes et maintes fois dénoncé depuis le 14 juillet 2000, M. Thibeault a également tenu à dénoncer le manque de transparence flagrant qui caractérise les négociations entre Québec, Ottawa et les Ilnutsh. Et il dit craindre pour « une crise sociale sans précédent au lendemain de la signature du traite » s'il n'y a pas eu acceptatibilité sociale au préalable.

Il n'en fallait pas tant pour faire sauter de ses gongs le chef Gilbert Dominique qui n'attendait qu'une passe du genre pour quitter la table des négociations en se disant, encore une fois, « très déçu » !. Bien qu'il ait refusé de commenter les attaques de ses vis-à-vis du RLTP, le chef Dominique a toutefois pris le temps de préciser qu'il n'entendait pas exproprier tout ce beau monde une fois le traité signé. « Rassurez-vous, dit-il. Il n'est pas dans mes intentions de demander aux villégiateurs de s'en aller avec leur chalet sous le bras. Il peut arriver que dans certaines zones sensibles, il y ait quelques déménagements. » Quand cela arrivera... « nous ferons les choses de façon courtoise », et il appartiendra alors au gouvernement du Québec de dédommager les villégiateurs visés.

Si le chef Dominique pensait calmer le débat sur cette déclaration saugrenue, on ne peut pas dire que le grand Manitou des Ilnutsh aura su l'inspirer. C'est là exactement le genre de déclaration qui envenime au lieu d'adoucir. Cette déclaration exprime effectivement toute le pouvoir qu'il a déjà en main, même si le traité n'est pas encore signé, et devrait nous faire réfléchir sur ce qui s'en vient. Si nous avions besoin d'un autre aveu du danger qui guette tout ce qui n'est pas ilnut dans ce traité, considérons ce mandat comme accompli. Si tout se passe comme le grand-chef l'espère, les Ilnutsh auront incontestablement le droit d'expropriation sur les terres du Nitassinan qu'ils auront péremptoirement et arbitrairement classées comme sacrées. Il ne pouvait être plus explicite et plus conforme envers les déclarations de ses prédécesseurs qui se tiennent l'une dans l'autre comme les maillons d'une chaîne déjà forgée pour étrangler tous ceux qui n'auront pas sur le front, l'estampille « Ilnut, approuvé Canada-Québec ».

Malgré tous les beaux mots d'apaisement prononcés par les courroies de transmission gouvernementales, et malgré tous les discours des politiciens, comprenons que le projet de l'Approche commune, depuis les tous débuts de cette sordide affaire, tient toujours le cap conformément au programme initial qui se résume à ceci : « Contrairement aux traités avec les autres nations où on dresse la liste des compétences, nous [les Ilnutsh] partons avec toutes les compétences assorties d'une liste d'exception » (in Le Soleil, 13 juin 2002). Ce qui, en la circonstance, signifie que tous ceux et celles qui ne sont pas Ilnutsh seront considérés, le cas échéant, comme des locataires dans leur propre pays, des gens dont la présence sera tolérée et dont les droits inaliénables auront été transmués en privilèges accordés par les vrais maîtres du territoire, les Ilnutsh qu'il faudra alors prendre bien soin de ne pas « décevoir »...

Russel Bouchard

mercredi, février 14, 2007

Négociations sur l'Approche commune – Le gouvernement Charest change sa courroie de transmission avant même d'avoir réussi à faire tourner la première

Le ministre délégué aux Affaires autochtones du Québec, l'honorable Geoffrey Kelley, était à Roberval mardi, 13 février, pour annoncer le retrait de Benoît Bouchard à la table des négociations sur l'Approche commune, et son remplacement par M. Anthony Detroio qui s'est empressé de sauter sur le fromage ainsi tendu par le gouvernement du Québec. Pour ceux qui craignent pour le fond de pension de M. Bouchard, rassurez-vous et ne faites pas brûler de lampions, car M. Bouchard n'a fait que de changer de chéquier, passant ainsi du provincial au fédéral, là où on sait bien faire cette sorte de choses.

Pour ceux qui ne connaissent pas M. Detroio, disons seulement qu'il est fort connu sur la Côte-Nord, et qu'il a été membre du conseil de Port-Cartier durant 31 ans, dont 23 ans comme maire. En effet, M. Detroio n'est pas le dernier venu dans les officines et les alcôves gouvernementales. Comme son prédécesseur, il est un retraité qui s'ennuyait à faire des canards de bois et des petits gâteaux avec sa vieille dans sa doulcereuse retraite, et il sait mieux que quiconque ce qu'est une vessie et ce qu'est une lanterne. Dans ces circonstances, il ne faut surtout pas se méprendre sur son habilité à nous faire passer l'une pour l'autre puisque, aux dires mêmes du ministre Kelley, M. Detroio « connaît très bien le milieu municipal » ; ce qui, dans cette sorte de langue de bois, est une manière de dire que c'est auprès de ces gens qui aiment bien les cinq à sept, et non auprès du peuple, qu'il entend se faire tourner la courroie.

En tout cas, ses déclarations de la veille, pour le moins alambiquées, n'ont pas l'heur d'apaiser mes craintes et mes doutes si, comme je n'ai aucune peine à imaginer, elles réussissent toutefois à apaiser ceux des Montréalais, des journalistes, des députés et des maires de Roberval, Saint-Prime et Saint-Félicien, ces municipalités limitrophes qui ont appris à se repaître des miettes tombant de la table plantureuse de Mashteuiatsh. « Quand j’étais maire de Port-Cartier, dit M. Detroio, j’entendais les gens dire qu’on n’aurait plus le droit de chasser ou d’avoir un chalet. Il faut donner les réponses au public et il faut aussi savoir ce qui chicote les élus et la population blanche. » (Le Soleil, 14 février) « Certains propriétaires de chalet ont peur de perdre leurs baux de villégiature. Ils ne les perdront pas. Ce n'est pas parce qu'il va y avoir un traité que les gens vont perdre leurs privilèges » (Le Quotidien, 14 février). Les soulignés de ces citations textuelles sont de moi.

Premier vice de forme : « population blanche ». On aura pris note par cette citation : primo, que M. Detroio est là pour servir de « courroie de transmission » à un seul segment de la population (« blanche » en l'occurrence !) ; secundo, que cette « courroie » n'a qu'une couleur de peau ; et tertio, qu'elle n'a pas été allongée par le P.M. Charest pour se rendre jusqu'au long house des Métis du Saguenay–Lac-Saint-Jean–Côte-Nord, lesquels pourtant, ont utilisé avec une infinie patience tous les canaux de la raison offerts par la démocratie et la Constitution canadienne pour faire valoir leurs droits.

Deuxième vice de forme : « privilèges ». Les propriétaires de chalets doivent désormais se le prendre pour dit : ils n'ont aucun... droit sur ce qu'ils croient être leur propriété, mais bien des... « PRIVILÈGES » ! Ce qui les réduira à rien du tout lorsque dans trois, cinq, dix ou quinze ans il leur viendra à l'idée de vendre, acheter ou donner en héritage leur patrimoine. Comprenez, par cette affirmation officielle particulièrement inquiétante, qu'une fois ce traité signé, les seuls régionaux à avoir des « droits » sur ce territoire qu'ils ont baptisé sur le tard de Nitassinan (la Boréalie québécoise, pour les Métis), seront les autochtones statués ilnutsh, et que les autres, Métis et Canadiens français compris, n'auront que le privilège de locataires. Ce seul point d'ordre est une totale négation de la logique des choses, une insulte à l'intelligence humaine, et l'expression d'un odieux mépris à l'endroit de tous les autochtones vivant sur ce territoire qui sont non seulement Indiens, mais aussi Inuits, Métis et Canadiens français.

Dans ces circonstances, les membres de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, prennent comme une insulte suprême le fait de ne pas avoir été mis au courant de ce jeu de chaises musicales, et une double insulte suprême celui d'avoir été officiellement ignorés dans cette annonce publique qui traduit fort bien l'état d'esprit du gouvernement libéral et de ses négociateurs. Cela étant, on aura compris que les paroles lancées à Chicoutimi par André Harvey (« Pour l'Approche commune, nous voulons favoriser l'harmonie dans le respect mutuel », dixit A. Harvey, dans Le Quotidien du 9 février), en présence du P.M. Charest, n'étaient que des propos racoleurs destinés à s'attirer l'adhésion des Métis de son comté ; qu'elles n'ont fait qu'amplifier nos doutes et notre dégoût de cette sorte de politicaillerie à la libérale ; et qu'elles justifient nos actions déposées en Cour supérieure pour obtenir la reconnaissance de nos droits inaliénables.

Pour dire court et bien, voilà une manière de faire gouvernementale qui va à l'encontre des jugements Powley et Haïda, dans lesquels il est clairement dit que les gouvernements supérieurs doivent obligatoirement : 1- consulter les populations autochtones avant de bouger sur un territoire, ce qui implique directement les Métis ; 2- de négocier de bonne foi ; et 3, de le faire en prenant bien soin de protéger la dignité de ces gens. Devant un tel déni des règles jurisprudentielles directement bafouées par ceux-là même qui sont chargés de les faire respecter, c'est de deux choses l'une : où le gouvernement de Jean Charest est le plus mal intentionné qui soit à l'égard des Métis, ou il a décidé de foncer bêtement vers l'abîme judiciaire en jouant au quitte ou double ; ce qui, dans un cas comme dans l'autre, est un pari bien risqué pour la paix sociale et un jeu de cause à effets bien mal inspiré dans lequel les Métis n'entendent surtout pas jouer. Si cela devait malheureusement arriver, s'il devait le perdre ce pari, ce gouvernement aura été clairement averti. Par voie de conséquences, il devra rendre des comptes envers la Justice qui est la voie que nous sommes contraints de prendre, envers le peuple et envers l'histoire qui s'écrit...

Russel Bouchard

lundi, février 12, 2007

La Communauté Métisse du DRSM , dépose une nouvelle requête en Cour supérieure, pour faire valoir ses droits ancestraux

Aujourd'hui, 12 février 2007, le procureur de la Communauté Métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, Maître Daniel Côté, a déposé à la Cour supérieure de Chicoutimi l'intervention de la CMDRSM dans la cause de Ghislain Corneau. Cette cause avait déjà fait l'objet d'une demande reconventionnelle auprès de la Cour, il y a environ deux mois. Cette fois-ci c'est la Communauté qui s'implique directement en réclamant les droits aborigènes pour son membre.

Lisez plutôt la teneur de la déclaration d'intervention.

Russel Bouchard


DÉCLARATION D’INTERVENTION

AU SOUTIEN DE LEUR INTERVENTION, LES INTERVENANTS EXPOSENT CE QUI SUIT :

1.- L’intervenant Jean-René Tremblay est le chef de la communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan;

2.- L’intervenante Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan est une personne morale sans but lucratif constituée en vertu de la partie II de la Loi sur les corporations canadiennes, et immatriculée au registre des entreprises du Québec sous le numéro 1162797253, le tout tel qu’il appert des lettres patentes, des lettres patentes supplémentaires et d’un extrait du registre des entreprises, produits en liasse sous la cote I-1;

3.- La Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan a été constituée en personne morale pour faire la promotion et représenter à titre d’agent les intérêts collectifs des autochtones métis qui en sont membres et qui sont des descendants de la communauté métisse historique dont les membres vivaient jadis sur un territoire plus vaste que la région du Saguenay-Lac-St-Jean-Côte-Nord, connu au 18e siècle comme étant les _Domaine du Roy_ et _Seigneurie de Mingan_, avant que les Européens n’aient établi leur domination politique et juridique, soit vers 1843, le tout tel qu’il sera démontré lors de l’enquête;

4.- L’intimé Jean-René Tremblay est le chef de l’Association que constitue la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, laquelle est une association de personnes au sens des article 2267 et suivants du Code civil du Québec ( ci-après «l’Association»), ses membres, au nombre d’environ 3,400 actuellement, s’auto-identifient Métis, sont d’ascendance mixte indienne et européenne, étant pour la plupart des descendants de l’une des seize (16) familles métisses souches des Domaine du Roy et Seigneurie de Mingan, ont des liens ancestraux avec cette communauté historique métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan et possèdent une culture et une identité distinctives par leurs pratiques, coutumes, traditions, constituant ainsi des Métis au sens de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982;

5.- Les chefs des seize (16) familles métisses souches des Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, qui figurent parmi les ascendants de la plupart des membres de la Communauté métisse contemporaine sont énumérés dans un ouvrage généalogique élaboré en 2005 par Ser-Alexander Alemann et intitulé « Nomenclature des métis Domaine du Roy - Mingan » et produit au soutien des présentes sous la cote I-2, il s’agit de Louis-Denis Bacon, Louis Chatellereault, Thomas Cleary, Joseph-André Collet, Frédéric Filion, Louis Gariépy, Denis Godin, Barthélémie-Roger Hervieux, Antoine Lavaltrie, Peter McLeod, Alexander Murdock, Nicolas Peltier, Antoine Riverin, Raphaël Sheehan, Jérôme St-Onge et Pierre Volant;

6.- Les membres de l’«Association» et de la «Communauté» sont des Autochtones au sens de l’article 25 et de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, puisqu’ils répondent aux critères établis par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Sa Majesté La Reine c. Steve et Roddy Charles Powley et le Procureur général du Canada et als, (2003) 2. R.C.S. pp. 207 à 235, pour être qualifiés de Métis du Canada;

7.- En conséquence, les membres de l’«Association» et de la «Communauté» bénéficient tant individuellement que collectivement des droits, libertés et garanties visés à l’article 25 et à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, et la communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan est un «peuple autochtone» au sens de ces dispositions;

8.- À cet effet, les intervenants produisent en l’instance trois expertises de l’historien Russel Bouchard démontrant l’existence, sur les territoires connus au 18ième siècle comme étant les Domaine du Roy et Seigneurie de Mingan, d’une communauté métisse historique antérieure à l’affirmation de la souveraineté de l’État moderne vers 1843, d’une communauté contemporaine ayant des liens ancestraux avec ladite communauté historique qui n’a jamais cessé d’exister et d’une culture distinctive métisse, lesquelles expertises sont produites respectivement sous les cote I-3 : « La communauté métisse de Chicoutimi : fondements historiques et culturels », I-4 : « Le peuple Métis de la Boréalie : Un épiphénomène de civilisation » et I-5 : « La longue marche du Peuple oublié… Ethnogenèse et spectre culturel du Peuple métis de la Boréalie »;

9.- Une grande partie de l’expertise de l’historien Russel Bouchard sur la communauté métisse de la Boréalie lui provient des travaux qu’il a réalisés, sur une période d’une trentaine d’années, sur l’analyse du journal quotidien rédigé par Neil McLaren, alors qu’il était responsable du poste de traite de Chicoutimi de 1800 à 1804, lesquels travaux de recherches historiques sont décrits dans un ouvrage publié en 2000 et intitulé «Quatre années dans la vie du poste de traite de Chicoutimi/Journal de Neil McLaren (1800-1804)», produit au soutien des présentes sous la cote I-6;

10.- Les limites du Domaine du Roi furent établies en 1733 par une ordonnance de l’Intendant Gilles Hocquart, produite au soutien des présentes sous la cote I-7;

11.- Les limites de la Seigneurie de Mingan sont décrites dans l’Acte Seigneurial Refondu, produit au soutien des présentes sous la cote I-8;

12.- La culture métisse peut être définie comme étant la fusion originale du patrimoine des Européens et celui des Indiens ou des Inuits ;

13.- L’identité métisse est distinctive de celle des Européens et de celles des Indiens et des Inuit;

14.- La culture métisse était et est toujours distinctive de celles des autres peuples autochtones, notamment après avoir acquis, adapté et intégré à leur propre culture autochtone :

a) des langues européennes ;

b) l’écriture européenne;

c) les costumes européens et autochtones;

d) le mode alimentaire européen et autochtone;

e) la façon de construire et de chauffer les habitations;

f) la doctrine chrétienne sur l’origine de l’Homme, le Paradis et l’Enfer et ses symboles tels Saint-Joseph et Sainte-Anne;

g) des règles de droit européen, notamment celles applicables en droit des contrats et aux mariages et des règles autochtones en semblable matière;

h) des inventions européennes, notamment le fer, la poudre et les armes à feu ;

15.- Les Métis ont également des règles qui leur sont propres étant régis par leurs propres coutumes sur leur territoire, notamment quant à leur rapport avec la nature et le territoire, soit :


a) en explorant de nouveaux territoires;

b) en faisant le commerce et la traite des fourrures tout en développant des techniques de récolte des animaux qui leur sont propres;

c) en créant un mode de vie basé sur l’économie de traite des fourrures;

d) en occupant le rôle d’interprètes des langues européennes et autochtones;

e) en créant leur langage et dialectes en créant leur musique, leurs chants, leurs danses et leurs contes ou légendes;

f) en formant leur communauté;

g) en créant leur propre diplomatie, laquelle a rendu possible la signature de traités de paix et de commerce entre les peuples autochtones et européens, en intégrant des pratiques chrétiennes à la spiritualité autochtone;

i) en créant des canots et autres embarcations selon leur propre mode de fabrication destinés à la traite des fourrures, à la pêche, de même que des cages leur permettant l’exploitation des ressources forestières du territoire;

j) en utilisant les ressources de la flore à des fins médicinales tout en transmettant ce savoir aux Européens;

k) en construisant à même les ressources forestières du territoire des habitations selon des méthodes de construction qui leur sont propres (shacks ou cabane en rondins);

l) en exploitant les ressources hydrauliques du territoire par la construction de barrages, notamment sur la Rivière du Moulin (Chicoutimi) et sur la Rivière noire (Saint-Siméon) lesquelles servaient aux fonctionnement de moulins à scie, par l’installation d’estacades pour retenir le bois flottant, notamment celle connue comme « le grand bôme », traversant la rivière Saguenay, attachée aux deux rives sur les terres de Simon Ross et de Peter McLeod Sr, deux chefs de clan métis, tout en se servant de cette même force hydraulique pour la drave et le transport des dalles;

m) en créant une économie qui leur est propre fondée sur la traite des fourrures, la pêche et la cueillette des ressources naturelles sur le territoire;

n) en créant un mode distinct de communication, utilisant les fréquents voyages des Métis lesquels étaient porteurs des nouvelles;

16.- Les Métis que l'on qualifiait alors et également de «gens libres», par opposition aux allochtones (soit tous les peuples qui ne sont pas autochtones au sens de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982), avaient tous les droits des autochtones indiens et inuits. Comme ces derniers, mais à leur manière, ils ont développé au cours des âges des coutumes, pratiques et traditions qui font partie intégrante de la culture distinctive des demandeurs et de leurs ancêtres avec le «Territoire», notamment :

a) la chasse, la trappe, la pêche et la cueillette pour fins de subsistance, sociales, rituelles et commerciales;

b) l’utilisation des cours d’eau et des plans d’eau, y compris les rivières, lacs et étangs;

c) le contrôle et la gestion du territoire y compris le contrôle et la gestion de la faune, de la flore, de l’environnement et des ressources du territoire;

d) l’exploitation des ressources forestières pour fins de subsistance, sociales, rituelles et commerciales;

e) l’utilisation du territoire pour fins religieuses et spirituelles, y compris aux fins de sépultures et aux fins de rites et de traditions particulières;

f) l’exploitation et la jouissance des ressources naturelles du territoire et l’usage de ses fruits, produits et ressources;

g) eu égard à la nature des ressources naturelles dont il est question précédemment, il s’agit de la terre, la faune (y compris la faune terrestre, aquatique et aviaire), la flore (y compris les ressources forestières), les eaux (y compris les cours d’eau et les plans d’eau dont les rivières, lacs et étangs) et les minéraux;

h) en appliquant sur l'ensemble de leur territoire leur propre système de justice et policier (qui était en fait la loi du pays et que l'histoire qualifiera de « régime des fiers-à-bras»), ce qui faisait d'eux les maîtres réels du territoire;

i) en pratiquant sur le territoire, jusqu’en 1875, des mariages dits à la mode du pays;

j) en maintenant une autonomie gouvernementale, notamment autour du clan présidé par Peter McLeod Jr;

17.- Le 5 décembre 2005, Ville de Saguenay reconnaissait l’existence et la présence sur son territoire de la Communauté métisse demanderesse, le tout tel qu’il appert de l’extrait du procès-verbal du Conseil de la ville, produit au soutien des présentes sous la cote I-9;

18.- Dans sa requête en dépossession, la requérante, Procureure générale du Québec, mentionne et prétend que l’intimé Ghislain Corneau occupe illégalement l’emplacement décrit au paragraphe 1 de la requête où il a érigé et où il maintient un bâtiment;

19.- Dans sa défense l’intimé allègue, qu’à titre de Métis, membre de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, il n’a besoin d’aucune autorisation ministérielle pour maintenir le bâtiment qu’il a érigé sur l’emplacement visé puisqu’il s’agit en conformité avec l’article 54 de la Loi sur les terres du domaine public qui lui permet de le faire _dans l’exercice d’un droit_, lequel droit constitue un droit ancestral autochtone protégé par l’article 35 de la Loi Constitutionnelle de 1982, lequel se lit comme suit :

_35 Confirmation des droits existants des peuples autochtones. (1) Les droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés.

(2) Définition de _peuples autochtones du Canada_ Dans la présente loi, _peuples autochtones du Canada_ s’entend notamment des indiens, des Inuits et des Métis du Canada._

20.- En effet, dans sa défense, l’intimé Ghislain Corneau prétend qu’à titre de Métis, membre de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, il bénéficie de droits ancestraux sur le territoire où est situé l’emplacement visé par la requête et plus particulièrement sur ce qui constituait le territoire traditionnel de chasse, de trappe, de pêche et de cueillette pour se nourrir des ancêtres métis de la Communauté;

21.- Il allègue qu’à titre de membre du groupe, soit la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, qui a le droit de perpétuer cette pratique, coutume ou tradition, il a le droit de maintenir un bâtiment sur ledit emplacement sans autorisation ministérielle;

22.- Comme l’a défini la Cour suprême du Canada dans les affaires R. c. Powley (2003) 2 R.C.S. 207 et R. c. Sundown (1999) 1 R.C.S. 393, les droits ancestraux d’un Métis relatifs aux activités de chasse, de trappe, de cueillette et de pêche pour se nourrir sont des droits collectifs aux membres de la communauté dont il fait partie et le droit de maintenir des abris aux fins de ses pratiques ancestrales sont des droits accessoires à l’exercice desdits droits ancestraux;


23.- Aussi, les intervenants en la présente cause allèguent que les membres de l’«Association» et de la «Communauté» ont occupé les territoires du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan de la manière suivante:

a) ils sont les descendants et successeurs des Autochtones métis qui ont occupé, fréquenté, utilisé et possédé de façon continue les territoires connus au 18ième siècle comme étant les Domaine du Roy et Seigneurie de Mingan, depuis des temps ancestraux, et au moins depuis 1763, soit l’époque où le roi Georges III d’Angleterre a affirmé sa souveraineté sur la Nouvelle-France;

b) de fait, les Métis sont issus de mariages, d’unions civiles ou d’unions à la façon du pays entre les Autochtones et les Européens, il s’ensuit que les Métis étaient présents sur ce territoire avant même la présence britannique sur ce même territoire et l’affirmation de la souveraineté du roi Georges III sur ledit territoire

24.- En fait, dès le 17e siècle et par la suite, les Métis ont occupé et partagé le territoire, compte tenu de leurs fonctions de guerriers, d’interprètes, de coureurs des bois, de voyageurs, de traiteurs des fourrures, de guides, de messagers, de fournisseurs, de transporteurs, de portageurs, d’intermédiaires entre les sociétés autochtones et européennes ainsi que d’exploitants forestiers et industriels;

25.- De la manière mentionnée aux paragraphes 15 et 16 des présentes, tant sous les régimes français qu’anglais, les Métis ont exercé leurs droits territoriaux et ancestraux sur les territoires connus au 18ième siècle comme étant les Domaine du Roy et la Seigneurie de Mingan;

26.- Les membres de la communauté métisse historique de la Boréalie se sont concentrées autour des anciens lieux de traite et d'occupation évalués à au moins 26, soit Mingan (1661), Cormoran (1661) Moisie (1694), Sept-Îles (1650), Anticosti, Godbout (1670) Manicouagan (1664), Papinachois (1694), Betsiamites (1661), Islets-de-Jérémie (1672), Mille-Vaches, Bon-Désir (1721), Tadoussac (1652), La Malbaie (1701), Chicoutimi (1671), Métabetchouan (1676), Pointe-Bleue (1884), Temiscamay (1825), Mistassini (1673), Neoskweskau (1787), Nemiscau (1684), Ashuapmushuan (1689), Nicabau (1684), Fort Piékouagami (vers 1846) et Waswanipi (1821). qui constituent toujours les principaux points d'ancrages. (Voir I-5 aux pages 101 et 203 à 213);

27.- Le 23 mai 1733, par l'ordonnance de l'intendant Gilles Hocquart, le roi de France reconnaît officiellement cette manière d'occuper le Domaine du Roi à partir des nombreux postes de traite établis entre Sept-Îles et Némiskau. Par cette loi écrite, qui est accompagnée d'un copieux Mémoire sur la Traite de Tadoussac, il détermine dès lors que les Indiens, les coureurs de bois euro-canadiens qui ont été soit adoptés par des Indiens, soit élevés dans les postes de traite, soit mariés avec des indiennes, sont les résidents naturels de ce territoire. Comme eux, les enfants et la descendance de ces unions métisses sont ainsi donc considérés comme des autochtones aux yeux des derniers Indiens et des dirigeants coloniaux. Ils y ont tous les droits qu'on leur reconnaît;

28.- En 1763, le Roi Georges III a reconnu par écrit les droits des peuples ou nations autochtones à l’occupation exclusive de leur territoire, de même qu’à la protection de leurs biens et de leur mode de vie, tel qu’il appert de la Proclamation royale de 1763, produite au soutien des présentes sous la cote I-10;

29.- De plus, dans ladite Proclamation royale, le roi Georges III s’est engagé sur l’honneur à consulter les Autochtones, obtenir leur accord et acheter leur territoire avant de le céder à ses sujets ou à des tiers non-autochtones, le tout tel qu’il appert de la partie du texte de la Proclamation Royale de 1763 qui s’applique aux nations autochtones, extraite et commentée par l’expert historien Russel Bouchard et produite sous la cote I-11;


30.- En 1763, les droits territoriaux des peuples ou nations autochtones de l’Est du Canada se sont cristallisés en droit anglais au moment de l’affirmation de la souveraineté de l’Angleterre sur le continent nord-américain;

32.- Depuis au moins le début du 18e siècle et jusqu’à aujourd’hui, les Métis ont occupé et défendu les territoires des Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, ce fut notamment le cas des ancêtres du défendeur et des intervenants en l’instance;

33.- Les droits ancestraux et territoriaux du défendeur et des intervenants sur les territoires en cause n’ont pas été éteints de façon claire et expresse par la Couronne, de telle sorte qu’ils sont toujours tenants;

34.- Le défendeur, Ghislain Corneau, est effectivement membre de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, étant un descendant d’Antoine Lavaltrie;

35.- Les intervenants ont donc intérêts à intervenir dans la présente cause afin qu’il soit reconnu à tous les membres de la Communauté leurs droits ancestraux de chasse, de pêche, de trappe et de cueillette pour se nourrir sur le territoire ancestral mentionné aux paragraphes 3, 10 et 11 des présentes ainsi que le droit accessoire d’y maintenir des abris dans l’exercice de ces droits;

36.- Les intervenants sont les seuls qui ont l’intérêt légal pour réclamer la reconnaissance de droits ancestraux, essentiellement collectifs, pour leurs membres;

37.- Les intervenants, au nom de leurs membres métis, ont les mêmes intérêts que l’intimé Ghislain Corneau et de ce fait, ils entendent soutenir et appuyer les prétentions de ce dernier;

38.- L’intervention des intervenants, par leur demande de reconnaissance de droits ancestraux collectifs, permet et permettra d’éviter une multitude de procès individuels relatifs aux droits ancestraux pouvant être soulevés par chacun des membres de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan;

39.- Il est dans l’intérêt de la justice de permettre l’intervention des intervenants;

40.- La présente intervention est bien fondée en faits et en droit.


PAR CES MOTIFS, PLAISE AU TRIBUNAL :

ACCUEILLIR la présente intervention;

RECONNAÎTRE et DÉCLARER que les membres de l’Association connue comme étant la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan forment, collectivement, une communauté métisse et constitue un « Peuple autochtone du Canada » (Métis du Canada) conformément à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982;

DÉCLARER qu’à titre de Métis, les membres de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan ont, collectivement, des droits ancestraux de chasse, de pêche, de trappe et de cueillette pour se nourrir sur le territoire ancestral mentionné aux paragraphes 3, 10 et 11 des présentes, soit un territoire plus vaste que la région du Saguenay-Lac-St-Jean-Côte-Nord, connu au 18e siècle comme étant les _Domaine du Roy_ et _Seigneurie de Mingan_;

DÉCLARER qu’à titre de Métis, les membres Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, ont, collectivement, le droit accessoire de maintenir, sur le territoire ancestral mentionné au paragraphe 3, 10 et 11 des présentes, soit un territoire plus vaste que la région du Saguenay-Lac-St-Jean-Côte-Nord, connu au 18e siècle comme étant _Domaine du Roy_ et _Seigneurie de Mingan_, des abris pour l’exercice de leurs droits ancestraux de chasse, de trappe, de cueillette et de pêche pour se nourrir;

REJETER la requête en dépossession de la requérante;

LE TOUT avec dépens contre la requérante incluant les frais des experts tant pour la préparation de leurs témoignages que de leur présence devant la Cour.

SAGUENAY, le 6 février 2007

AUBIN GIRARD CÔTÉ
PROCUREURS DES INTERVENANTS

AVIS SELON L’ARTICLE 211 C.P.C. (ancien)

Le Procureur général du Québec
Bureau du directeur général du contentieux
300, boulevard Jean-Lesage
Bureau 1.03
Québec (Québec)
G1K 8K6

Me Nancy Bonsaint
Mes Chamberland, Gagnon
300, boulevard Jean-Lesage
Bureau 1.03
Québec (Québec)
G1K 8K6

Procureurs de la requérante

PRENEZ AVIS que la déclaration des intervenants sera présentée pour réception en division de pratique de la Cour supérieure, le 2 avril 2007, à 9h30, au Palais de justice de Chicoutimi, 227, rue Racine Est, 3e étage, Saguenay, (arrondissement de Chicoutimi), ou aussitôt que conseil pourra être entendu.

Veuillez agir en conséquence.

SAGUENAY, le 6 février 2007

AUBIN GIRARD CÔTÉ
PROCUREURS DES INTERVENANTS
N_ : 8741-0CD202

Dans Chicoutimi-Le Fjord, le canditat Libéral, André Harvey, pressé de parler droit avec les Métis de son comté

* Erratum René Tremblay n'est pas le président-chef de la Communauté Métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan, mais un des directeurs membres du CA et son porte-parole officiel. R.B.

samedi, février 10, 2007

Des reliques de Louis Riel entrent par la grande porte au Musée de la Civilisation

Musée de la civilisation de Québec
Ben Weider donne le costume de Riel

Yannick Donahue
Journal de Québec
10/02/2007 08h38

Le Musée de la civilisation de Québec a reçu un don inestimable, hier: le costume de mariage du Métis Louis Riel.

Le collectionneur Ben Weider a non seulement donné le costume de mariage du Métis Louis Riel (1844-1885), mais aussi la robe de baptême de ses deux enfants, Jean (1882-1908) et Marie-Angélique (1883-1897), ainsi que Les codes de l'Empire français, datant de 1813 (dernière édition du vivant de l'empereur Napoléon).

Homme d'affaires bien connu dans le domaine du culturisme, Ben Weider voulait que ces objets puissent être vus par des millions de personnes et non par les quelques centaines qui passaient par sa demeure, où il les gardait.

S'il a choisi le Musée de la civilisation, c'est parce que les Québécois ont toujours soutenu Louis Riel, alors que d'autres peuples ignorent encore ses réalisations. «Je suis né à Québec, j'habite Québec, il m'apparaissait comme normal que ces habits restent ici», affirme-t-il.

gé de 83 ans, Ben Weider raconte avoir acquis le costume pour la somme de 9000 $ en 1988 dans un encan, à Montréal. «Le chandail de hockey de Wayne Gretzky a été vendu pour 153 000 $», lance-t-il à la blague.

Au musée, on se dit très fiers d'accueillir dans la collection nationale ces pièces empreintes d'un grand symbolisme.

«Peu de héros nationaux ont atteint l'importance de Louis Riel. Aujourd'hui, il est reconnu comme un des fondateurs du Manitoba et comme un grand chef dont le rôle et les réalisations ont profondément marqué l'histoire du Canada», a déclaré Claire Simard, directrice générale du musée.

Dès le mois de juin, les visiteurs du musée auront l'occasion de voir le costume de mariage dans l'exposition permanente Le temps des Québécois.

De plus, le journal tenu par Louis Riel lors de son passage, vers 1876-1877, dans un hôpital psychiatrique de Québec, fait partie des collections du Musée de la civilisation grâce au Séminaire de Québec.

Il est présenté dans une exposition sur la francophonie en Amérique du Nord, au Musée de l'Amérique française.

dimanche, février 04, 2007

Le purgatoire est loin d'être terminé pour les proprios de l'église Fatima, à Jonquière

Le Grand chef désavoue le propriétaire de l'église Fatima
Par Jean marc tremblay
Le Réveil, ce dimanche 4 février 2007

Dans son édition du 10 septembre 2006, Le Réveil annonçait que les autochtones qui ont acheté l'ancienne église Fatima en faisait leur «territoire» avec tous les avantages que cela implique. Six mois plus tard, la ville attend toujours qu'on lui paie les taxes dues.

Ville de Saguenay marche sur des œufs dans ce délicat dossier. Pour elle, l'ancienne église de Fatima est un bâtiment comme les autres et, de ce fait, a envoyé au propriétaire, Serge Lavoie, domicilié au 1178 de la rue Nelligan à Saint-Félicien, un compte de taxes de 95000$ pour l'année 2006, incluant les intérêts. Elle n'a jamais eu de nouvelles de M. Lavoie et attend toujours que la somme due soit payée.

Le propriétaire de l'église Fatima n'a toujours pas payés ses taxes.

Un nouveau développement est survenu il y a quelques jours. Vendredi midi, à l'émission animée par Myriam Segal sur les ondes de CKRS radio, Guillaume Carle, Grand chef de la Confédération des peuples autochtones du Québec a miné la crédibilité de Serge Lavoie, un personnage jugé aujourd'hui «indésirable».

Jugement

Lors de l'assemblée générale annuelle de la Confédération, il a été décidé à l'unanimité que M. Lavoie et plusieurs membres du Conseil des chefs étaient désormais des «indésirables», donc exclus. Ils ne peuvent donc plus poser aucun geste au nom de la Confédération.

Nous avons rejoint vendredi après-midi M. Carle pour expliquer cette décision. «Il a été apporté à notre attention des faits et des propos qui nous ont obligés à nous dissocier de ces personnes.

«Dans le dossier de l'église Fatima de Jonquière, nous ne sommes donc plus impliqués et M. Lavoie ne peut agir en notre nom. Je ne peux donc pas vous dire où en est rendu le dossier du compte de taxes. À l'époque, j'avais suggéré à Serge Lavoie de demander le statut de lieu de spiritualité, ce qui lui aurait permis de ne pas payer de taxes, mais je n'ai eu aucune nouvelle de lui par la suite.»

La Confédération des peuples autochtones est née il y a un peu plus d'un an d'un schisme au sein de l'Alliance autochtone du Québec. Les 21 communautés locales sur les 26 communautés avaient alors décidé de former leur propre association pour défendre les intérêts des autochtones hors réserves. Nous avons tenté en vain de rejoindre M. Lavoie pour avoir ses commentaires.

samedi, février 03, 2007

De l'extrême fragilité du consensus ilnut — Le grand chef Raphaël Picard éplumé par les siens

Communauté de Betsiamites
Des citoyens en colère contre leur chef


http://www.radio-canada.ca/regions/est-quebec/2007/02/02/007-montagnais-colere.asp

Un groupe de citoyens de la communauté montagnaise de Betsiamites s'insurge contre la coupe forestière autorisée dans les limites de la réserve par le conseil de bande. Ils comprennent mal que le conseil, dirigé par le chef Raphaël Picard, investisse des millions de dollars pour poursuivre les gouvernements et les entreprises forestières pendant qu'il ne respecte pas les règles de gestion et de respect de l'environnement sur son propre terrain.

Roger Collard, un Innu de Betsiamites, est inquiet. « Notre forêt a été massacrée, disons. Ils font une coupe à blanc », dit-il. M. Collard ne s'attaque pas à une multinationale forestière. Il dénonce plutôt un entrepreneur à qui le conseil de bande a accordé un petit volume de bois, près de la rivière aux Rosiers, sur les terres de la réserve, là où les normes provinciales ne s'appliquent pas.

De son côté, le citoyen Gilbert Hervieux dénonce le fait que le vice-chef ait lui-même signé ce contrat qui permet de vendre le bois jusqu'à 10 fois moins cher que le prix payé sur les terres publiques du Québec. « Il devrait démissionner. Il est en conflit d'intérêts. C'est son frère », croit M. Hervieux.

Pour sa part, Gisèle Bacon comprend mal pourquoi le chef Raphaël Picard investit dans de coûteuses poursuites pour défendre les territoires revendiqués, dont l'île René Levasseur. « Je suis certaine qu'il y a un pourcentage de la population qui n'a jamais mis les pieds là-bas. Il devrait surtout s'occuper de son village avant au lieu d'aller défendre autre chose à l'extérieur », affirme-t-elle.

Cette sortie d'une quinzaine de Montagnais démontre que l'inquiétude s'installe à Betsiamites. Les citoyens remettent en question l'image de défenseur de l'environnement et de bon gestionnaire que se donne Raphaël Picard, tout cela pendant que la communauté accumule un déficit de 20 millions de dollars.