dimanche, mai 28, 2006

La loi sur les armes à feu, une injustice qui pousse au désengagement citoyen et ajoute à la fracture entre Montréal et les régions excentriques

M. Alfred Mignot, administrateur du forum VoxLatina, réagit par courrier privé à mon commentaire et me dit qu'il n'a pas compris « quel était le lien de causalité entre la loi que vous critiquez et la perte de votre gagne-pain ». Cette remarque est justifiée et m'oblige à revenir sur le sujet en développant davantage sur ce point précis et à expliquer le but premier de ma lettre au Le Devoir.

Avant l'arrivée de cette loi qui multiplie les embûches pour les chasseurs et détenteurs d'armes à feu, les armuriers du Canada pratiquaient leur art selon une coutume séculaire qui avait quand même bien évoluée au fil des siècles ; les changents s'étaient faits tout naturellement, et s'ajustaient ainsi à l'évolution de notre société, tant canadienne que québécoise. Les règles qu'il me fallait suivre, comme bon citoyen, étaient donc celles établies par la coutume et par la loi ; mon inventaire d'accessoires était stable ; j'ouvrais ma boutique en juin jusqu'à l'ouverture de la chasse à l'orignal ; je faisais mon bilan en fin d'année, payait mon permis et mes impôts et récoltait le profit qui était bien peu en considération de tous les efforts que j'y mettais. C'était la règle et je la respectais.En octobre, ma pratique prenait un temps de repos et je recevais ma clientèle sur rendez-vous, ce qui me permettait de passer au mode écriture pour combler mon année.

C'était là la jouissance de ma liberté, en tant que bon citoyen et homme responsable devant la loi.

Mais voilà, lorsque la loi fut changée (une révolution dans le genre), cet équilibre séculaire fut rompu. Les obligations créées aux acheteurs étaient devenues telles que l'armurier que j'étais devait soutenir des inventaires davantage importants, garder encore plus longtemps les armes en consignation en raison de l'attente des permis, et remettre en vente les armes des clients refusées par la police du Québec qui est, en toutes circonstances, infiniment plus zélée que tous les autres corps de polices du Canada réunies. Et, comme un malheur n'arrive jamais seul dans cette sorte de dérangements, l'État s'est employé à abuser de la situation, les permis ont augmenté en nombre et en coûts, il fallait désormais verser trois mois d'impôts à l'avance en considération du chiffre d'affaires de l'année précédente, en plus de subir les visites policières qui n'avaient plus besoin de s'annoncer (même dans ma maison privée) et s'exposer à voir son dossier criminalisé en cas d'une simple erreur.

Pour dire court et bien, de citoyen responsable jouissant des droits et libertés assurés par la coutume et la loi, les armuriers sont devenus, au regard de la police, de la justice et des Parlements, des criminels qu'on tolère, et tous les prétextes étaient bon pour leur faire la vie dure afin qu'ils ferment boutique. En considération, les inconvénients, dangers et coûts auxquels je m'exposais étaient devenus tels que, de guerre lasse, j'ai décidé de fermer boutique. C'était là ma principale entrée d'argent pour nourrir ma famille.


Russel Bouchard

P.-S. Cela étant, il me faut dire également, avant de quitter, que la question que j'ai soulevée ici (« Lettre ouverte aux journaux du Québec et plus précisément au Le Devoir ») en est une d'importance au Québec. Elle tente de mettre en relation un problème récurrent, celui de la domination de Montréal sur l'ensemble des régions du Québec. Dans la perspective de la lutte pour l'Indépendance nationale, j'ai utilisé ici un sujet qui soulève présentement les passions chez nous (le registre des armes à feu), pour mettre en relief cette anomalie structurelle voulant que le principe fondamental de l'égalité des chances, selon qu'on vive à Montréal ou dans les régions excentriques, est bafoué. Ce qui est la cause d'une mauvaise répartition de la richesse selon les secteurs ; et ce qui explique, à son tour et en partie, un accroissement de la morbidité et de la pauvreté, un effondrement économique, une balance migratoire totalement déséquilibrée et déficitaire pour les régions ressources qui se sentent, à tort ou à raison, spoliées par Montréal, ressorts d'une fracture sociale qui s'élargit sans cesse entre notre Nord et notre Sud.

Dans ces circonstances, est-il possible, aujourd'hui, de faire l'indépendance du Québec ? Ou, encore, un Québec indépendant aura-t-il une incidence néfaste sur les régions excentriques abusivement cataloguées de « régions ressources » ?

samedi, mai 27, 2006

Le registre des armes à feu / Lettre ouverte au journal Le Devoir...

Lettre ouverte aux journaux du Québec
et plus précisément au Le Devoir.

Chicoutimi, le 27 mai 2006

À qui de droit.
Comme toujours, « Le Devoir » en tête, les journaux de Montréal, qui n'en finissent jamais de parler au nom de tous les Québécois et de voir les régionaux comme leurs vassaux, quand ce n'est pas comme leur entrepôt à matières premières et leur bac à vidanges, ne publient que leur voix à eux et rien qu'à eux ! Ils n'entendent pas recevoir et donner la mesure de ce que les autres pensent de dossiers dont les considérants leur sont pourtant communs.

Ce matin, une journée après l'autre depuis cette annonce du retrait du registre des armes à feu par le gouvernement Harper, vous publiez un puissant dossier « anti-armes » et favorable sans nuances au registre, signé Alec Castonguay, et occultez totalement ceux qui sont confrontés, par tous ses travers, à ce problème de police qui vous conforte mais nous ulcère ! Hier, c'était votre chroniqueur plein air pour qui j'ai le plus grand estime, M. Louis-Gilles Francoeur, à faire dans le mélo, et qui en débattait... Seul !!! Une habitude qui porte un nom : la Montréalisation du Québec profond quoi qu'il dise quoi qu'il pense.

Avant de vous présenter une lettre ouverte, vous nous demandez de bien nous présenter, alors permettez. Je suis Métis de Chicoutimi, historien et auteur. J'ai 57 ans et suis marié, père et grand-père, ce qui est mon petit bonheur. Avant, je tirais les revenus pour ma subsistance de ma boutique d'armurier et de mes écrits ; aujourd'hui, je vis (survis) entièrement de ma plume, parce que votre loi a tué mon gagne-pain en me volant une partie de ma liberté : 57 publications à mon actif, dont plusieurs livres sur les armes à feu, un au Boréal, un au ministère de la Culture, un au Septentrion, et d'autres dans l'Amérique anglophone ; le sujet de ma thèse de Maîtrise, à l'Université Laval, porte sur les armes à feu en Nouvelle-France. Malgré ces pré-requis, vous n'avez jamais voulu publier mes lettres ouvertes lors du débat qui a précédé l'adoption de cette loi.

Cela dit, je fais une ultime tentative. Je vous soumets humblement mon texte sur cette question cruciale et vous demande de le publier sans en altérer la teneur, ce qui nous permettrait enfin, à nous du Saguenay qui ne pensons définitivement pas comme vous, à Montréal, de vous donner notre appréciation de cette loi inique que vous vous époumonez à défendre sous sa forme actuelle ; malgré ses excès et ses débordements (1 G$ de coûts) ; malgré la gabegie qu'elle a permise et permet toujours ; malgré son manque de mesure qui ne va pas sans le fait que l'expérience des dix dernières années sont loin de démontrer qu'elle a aidé notre société à être plus sécuritaire, meilleure et plus paisible ; malgré l'injustice et les préjudices qu'elle nous cause...

Je suis, en tout et pour tout,

Russel Bouchard
33 St-François,
Chicoutimi (Saguenay)
G7G 2Y 5
418-543-0962

Nota bene :
Pour ceux qui veulent lire ce communiqué, voir « Abolition du registre des armes à feu : le rat de la ville contre le rat des champs ».

jeudi, mai 25, 2006

« Le Peuple Métis de la Boréalie », le livre est imprimé et la prévente se poursuit...

Mon opuscule, « Le Peuple Métis de la Boréalie : Un épiphénomème de civilisation », est dans les caisses et n'attend plus que le jour du lancement, toujours prévu pour le 21 juin, dix heures am, à la Maison d'Accueil de Ville Saguenay, rue Racine à Chicoutimi. Déjà plus de cents exemplaires de vendus, et la prévente se poursuit. J'invite les férus d'histoire et les intéressés à la cause métisse, à réserver leur exemplaire en adressant un chèque de 20 $ (qui comprend 15$ pour le livre et 5$ pour les frais de port), à mon attention et à mon adresse habituelle : Russel Bouchard, 33 rue St-François, Chicoutimi (Ville Saguenay), Qc, G7G 2Y5.

Prière de prendre note que la publication est à compte d'auteur et qu'elle ne bénéficie d'aucune aide gouvernementale. Il est de votre ressort de faire en sorte qu'elle soit une réussite si vous désirez qu'il y ait une suite. Ceux et celles qui ont déjà réservé leur exemplaire pourront en prendre livraison le jour du lancement ou la recevront par voie postale dans les jours suivants.

Russel Bouchard

Texte en quatrième couverture :
« Des canadiens voyageurs instruits des manières des sauvages par l’habitude de vivre avec eux » [dixit l'intendant Hocquart, 1733], voilà l’incontournable, le produit humain de cette rencontre. Cet épiphénomène historique, ce choc des civilisations qui a laissé des traces documentaires appréciables mais dont l’historiographie ne fait que commencer à considérer le fait, a ainsi donc permis aux Indiens de ce « pays » de survivre à l’hécatombe qui a provoqué, à la fin du XVIIe siècle, la disparition des Montagnais protohistoriques. Cela faisant, il a contribué, en contrepartie, à bouleverser la culture et l’apport génétique des descendants du groupe primitif (les Indiens) qui, malgré tout, sont restés collés au caractère d’une société nomade et archaïque. Et il a parallèlement donné naissance à un nouveau groupe humain (les Métis), plus sédentaire que nomade, dont les paramètres culturels empruntés aux deux cultures se sont définis plus particulièrement autour des postes de traite où ils ont évolué... »

Les Métis de la Boréalie sont-ils une communauté autochtone dans le sens de l’article 35 de la Constitution canadienne ? Voilà la question que tous les groupes en quête d’une reconnaissance officielle au Canada aimeraient bien avoir pour simplifier leur tâche ! » Et voilà la question à laquelle tente de répondre ce livre...» R.B.

dimanche, mai 21, 2006

Les Inuits, les singes et la théorie de l'évolution...

La semaine dernière, quand j'ai écrit mon papier sur nos accointances génétiques avec le singe, je vous avoue bien candidement que, dans mon esprit, ce n'était là qu'une manière de dérider l'ambiance parfois par trop cassante de l'actualité.

Juré craché, bien qu'il m'arrive souvent et volontairement d'être méchant et irrespectueux envers les dikats de la conformité qui nous soumettent par le haut et par le bas, je ne croyais pas, mais alors là pas du tout, avoir mis le doigt sur un bobo brûlant des croyances tenaces des Inuits du Grand Nord canadien. C'est fou comme les préjugés et la superstition ont des fibres tenaces parmi les humains. Imaginez maintenant mon étonnement de découvrir ce matin, à la page 24 du Journal de Québec, un sidérant papier (« Les autochtones refusent l'idée de descendre du singe ») où il est raconté l'histoire ahurissante d'un enseignant du village Inuit de Salluit (Alexandre April) à qui l'on a officiellement interdit d'enseigner la théorie de l'évolution.

Cela étant, je peux comprendre que, diffuser par un professeur mal instruit aux us, coutumes et croyances inuits, ce genre d'approche peut heurter certaines susceptibilités et certains tabous relatifs aux usages et pratiques du chamanisme, mais vous me permettrez de ne pas être d'accord avec le fait qu'on ne puisse présenter, à des enfants qui n'en n'ont rien à cirer de la querelle béotienne des grands, les différentes manières de concevoir l'histoire de l'humanité dans les quatre coins de la planète. C'est le genre de qui proquo qui n'a rien pour ennoblir la cause de ceux qui la défendent et qui nous montrent à quel point l'étroitesse d'esprit ne connaît ni couleur ni frontière...

M'excuse sincèrement auprès des singes de les avoir rabaissé à notre niveau...

Russel Bouchard


Pour ceux et celles qui veulent en savoir plus sur cette histoire abracadabrante, à lire le texte qui suit, signé Noémi Mercier :

Actualités
Darwin sur la glace
Dans certaines écoles du Nunavik, on interdit aux professeurs d’enseigner la théorie de l’évolution.

par Noémi Mercier

L’accueil qu’a reçu Alexandre April, au début de l’année scolaire 2005, lui a fait l’effet d’une gifle. La directrice de l’école du village avait réuni tout le personnel pour souhaiter la bienvenue aux nouveaux professeurs. Après les formules d’usage, quelques conseils furent prodigués aux enseignants: «Nous ne voulons pas entendre parler de la théorie de l’évolution ici», les a-t-elle avertis d’emblée. Depuis, chaque fois que le jeune enseignant du secondaire évoque l’évolution de l’homme dans ses cours de français et de sciences humaines, il se fait traiter de singe par ses élèves amusés. Certains parents, eux, ont été jusqu’à porter plainte contre ce prof récalcitrant, outrés de savoir qu’il affirmait en classe, malgré l’interdiction de la directrice, que l’être humain descend des primates.

On se croirait dans un de ces bastions créationnistes du Midwest ou du sud des États-Unis. Là-bas, des chrétiens conservateurs mènent une bataille acharnée pour que, dans les cours de science, la théorie de l’évolution soit remplacée par des explications divines des origines de la vie (Québec Science, avril 2006). Et pourtant, l’incident s’est déroulé au Québec, à Salluit, un village inuit de 1 150 âmes situé à l’extrême nord du Nunavik.

«Dès que je parle d’une période antérieure à 6 000 ans avant notre ère, date à laquelle Dieu aurait créé la Terre, je suis considéré comme fautif par l’administration de l’école», souligne Alexandre April, lui-même formé en biologie et en enseignement des sciences.

La tension a monté d’un cran en avril 2006, après qu’il eut présenté, dans un cours de première secondaire portant sur l’histoire des civilisations, Il était une fois l’homme, une série d’animation qui raconte l’histoire de l’homme à travers les âges.

La direction l’a alors convoqué pour le sommer de respecter la consigne «anti-évolution». «Faute de quoi, on m’a averti que je recevrais une lettre sanctionnant mon insubordination», raconte-t-il. Il lui est aussi interdit de répondre aux interrogations des élèves qui sont pourtant nombreux, dit-il, à le questionner sur ce sujet proscrit. «La plupart des professeurs préfèrent ne pas faire de vagues. C’est déjà éprouvant d’enseigner dans une communauté inuite: on est isolé, minoritaire. On ne veut pas froisser les gens, alors on préfère céder. Il s’agit toutefois d’une école publique et les élèves du Nord devraient avoir droit à la même éducation que les autres», estime l’instituteur qui a déjà remis sa démission et qui quittera la région d’ici quelques semaines. La directrice de l’école, Annie Alaku, et le directeur adjoint, Charles Roy, ont quant à eux refusé de répondre aux questions de Québec Science.

Salluit n’est pas le seul village du Nunavik où on escamote une partie de la matière pour ménager les sensibilités des habitants, selon Gaston Pelletier, directeur des services éducatifs à la commission scolaire Kativik. Cette organisation dessert près de 3 000 élèves dans 14 communautés inuites, sur un territoire de près de 650 000 km2. Ce serait surtout la parenté de l’homme avec les chimpanzés et les gorilles qui choquerait certains parents. «Dans quelques écoles, on veut bien parler de l’évolution des animaux, mais on ne parle pas des origines de l’homme. Dans la plupart des établissements, par contre, ces idées sont tolérées: on les explique à titre d’information mais, en général, on s’assure que les enseignants les présentent comme une théorie parmi d’autres, et non comme un fait», explique Gaston Pelletier. Face aux doléances des familles de Salluit, ce dernier a lui-même convenu avec l’administration de l’école «qu’on ne toucherait pas à l’évolution pour l’instant». «Quand il y a de la résistance dans une communauté, on respecte cela; on ne met pas de pression, par respect pour les croyances et la culture locales.»

Ces croyances n’ont cependant plus grand-chose à voir avec les traditions des Inuits. L’offensive anti-évolutionniste est plutôt associée à la ferveur religieuse des pentecôtistes, un mouvement protestant évangélique qui fait de plus en plus d’adeptes dans le Grand Nord depuis une quinzaine d’années (voir l’encadré). «Au Nunavik, il y a trois ou quatre enclaves où le pentecôtisme a une grande emprise sur une partie de la population. Ces personnes démontrent une certaine méfiance à l’égard de tout ce qui diffère du contenu de la Bible dont ils font une interprétation plutôt austère et traditionaliste», estime Jean Leduc, directeur de l’école de Kangiqsualujjuaq, dans la baie d’Ungava, où il travaille depuis bientôt 30 ans. Le mouvement demeure cependant marginal dans la plupart des villages, insiste-t-il. Son école à lui, par exemple, n’a jamais pris position contre la théorie de l’évolution ni reçu de plaintes à ce sujet.

N’empêche que des centaines d’élèves du Nord québécois se voient transmettre une version tronquée du programme, tandis que de nombreux autres apprennent à voir l’évolutionnisme comme une hypothèse qui n’a pas encore fait ses preuves. Au ministère de l’Éducation du Québec (MEQ), on marche sur des œufs. «C’est une question délicate, qui touche autant les écoles, la commission scolaire, le ministère de l’Éducation, les Affaires autochtones… Nous allons vérifier s’il y a des ententes particulières au sujet de l’évolution, mais c’est à la commission scolaire de s’assurer que le programme du ministère est bien respecté», dit la relationniste Marie-France Boulay. La commission scolaire Kativik, créée en vertu de la Convention de la baie James et du Nord québécois pour permettre aux Inuits de gérer leur propre système d’éducation, jouit bien d’une certaine autonomie, notamment en ce qui concerne la culture inuite et la langue inuktitute. «À part cela, les écoles de Kativik sont censées suivre le même régime pédagogique que tout le monde», affirme Marc Décarie, de la Direction générale de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec du MEQ, qui dit avoir informé ses supérieurs de la situation.

Le débat sur la théorie de l’évolution dans les écoles du Nunavik pourrait prendre une tournure très différente par rapport au reste de l’Amérique du Nord. Ici, on ne craint pas tant la confrontation entre religion et laïcité, droite et gauche, science et pseudo-science, mais plutôt une opposition entre Inuits et «Blancs du sud». «Nous sommes des Blancs, et nous enseignons dans une culture qui n’est pas la nôtre, poursuit Gaston Pelletier, de la commission scolaire Kativik. Les Inuits ont leurs propres idées et valeurs, et nous devons respecter cela. Nous leur apportons notre expertise, mais nous ne sommes pas des missionnaires et, pour l’instant, ils ne sont pas prêts! Et vous savez, il y a des problèmes bien plus urgents au Nouveau-Québec que l’enseignement de l’évolution de l’homme…»

samedi, mai 20, 2006

Abolition du registre des armes à feu : le rat de la ville contre le rat des champs

La semaine dernière, le gouvernement Harper, bien que minoritaire, a passé un règlement pour abolir le registre des armes à feu —un trou financier sans fond et totalement inefficace, noeud gordien d'une scandaleuse dilapidation des fonds publics qui a englouti, jusqu'ici, un milliard de dollards $$$. Si cette directive —qui est sensée être en application depuis son annonce— plaît aux citoyens chasseurs, collectionneurs et amateurs d'armes à feu et qu'elle comble ainsi leurs premiers voeux, elle soulève toutefois des cris inconsidérés du côté des anti-armes ; dont le gouvernement du Québec (aussi bien dire Montréal) et de l'Ontario (comprenons Toronto), l'opposition bloquiste et libérale à Ottawa, les colvusionnaires qui ont récupéré les tristes événements de la Polytechnique pour se faire la dent, et les pacifistes à outrance qui n'ont jamais su apprécier le comportement responsable de la société canadienne eu égard aux armes à feu, un phénomène de civilisation chez nous.

Curieux comme l'histoire se répète ! Observez bien les têtes qui pestifèrent à tous micros ces jours-ci, dans les journaux bien-pensants et devant les caméras télé, au nom d'associations et de partis pour exiger le maintien du fameux registre. Ce sont les mêmes qui ont proposé et défendu le projet de l'Approche commune (Montréal contre les régions ressources du Québec), ce sont les petits maîtres et serviteurs de banques qui dominent sur l'ensemble au nom de la démocratie et qui refusent d'en respecter les règles sitôt qu'elles contreviennent à leurs visions vertueuse de ce que doit être la société. Encore une fois, une collusion presque parfaite, un mariage incestueux entre le Parti libéral du Canada, le Parti libéral du Québec et le BLOC (!). Je dirai même je dirai plus, c'est Montréal contre le reste du Québec et du Canada, Toronto contre le reste de l'Ontario et du Canada, les féministes intégristes contre tout ce qui n'est pas soumis à leurs diktats, la gent policière qui n'en n'a jamais assez pour soumettre le bon peuple, le rat de la ville contre le rat des champs. Pour dire autrement, ce sont les extrémistes et tenants des pouvoirs de la bonne société feutrée contre une majorité travailleuse et débonnaire qui a erronément cru que la raison finirait bien un jour par l'emporter sur l'émotion...

Dans la République des Soumis, il est une lapalissade de dire que pour étendre la tyrannie, il faut plaider l'intolérance au nom de la vertu, dire que son chien a la rage pour justifier sa mise à mort. Des sondages de dernière heure nous disent qu'une majorité de Québécois et d'Ontariens refusent l'abolition du fameux registre. Et c'est, nous assure-t-on, ce qui fait s'agiter le premier ministre Charest par la voix de son ministre de la Sécurité publique, qui se fait l'écho de ceux et celles qui demandent —ou plutôt qui exigent !— le maintien d'une règle insane qui s'acharne contre l'honnête citoyen chasseur, une règle qui n'a jamais fait l'unanimité et qui a largement prouvé son efficacité.

Mais qui sonde les sondeurs ? Si les sondeurs de la firme « Pesant et Pesant » se sont employés à questionner les postes de police des grandes villes du pays, les résidents du « Plateau », de Westmount, des rues Ste-Catherine et Young, comment pourrait-il en être autrement ? Prenez ce même sondage, que nul d'entre nous n'a pu questionner, et concentrez-le au Saguenay—Lac-Saint-Jean–Côte-Nord—Abitibi—Gaspésie et Mauricie. En fait, dans ces régions où la culture de la chasse et le contact avec les armes à feu s'inscrivent dans l'histoire, la culture et les coutumes. Questionnez les membres de la Communauté métisse du Domaine du Roy / Mingan, questionnez les Indiens, les Inuits et les Métis du Canada, étendez votre sondage à ces communautés régionales où la chasse fait partie d'un mode de vie et d'une culture ancestrale, et faites-nous part de vos résultats ! On verra bien si le poids du premier survit au poids du second !...

Russel Bouchard

jeudi, mai 18, 2006

Première historique, les Métis de la Colombie-Britannique, officiellement reconnus. Qu'attend Québec pour s'ajuster à cette réalitÉ ?!

Radio-Canada, le vendredi 12 mai 2006
Journée historique pour les Métis de la Colombie-britannique

Pour la première fois de l'histoire, les Métis sont reconnus officiellement en Colombie-Britannique.

La province a signé avec eux un accord historique qui leur permettra de se développer économiquement et socialement.

C'est un grand jour pour les Métis qui soulignent que leur culture est bien différente des Autochtones et qu'ils ont souffert d'un manque de reconnaissance pendant trop longtemps.

Le ministre des Relations autochtones, Tom Christensen, explique toutefois qu'il n'y a pas encore d'engagement financier. Le ministre affirme qu'il s'agit d'abord d'une entente historique, sur laquelle la province et les Métis pourront travailler ensemble.

Il y a 45 000 Métis en Colombie-Britannique, qui habitent une trentaine de municipalités.

La gent simiesque et... l'Article 35(1) de la Constitution canadienne ! Faut-il se réjouir de cette découverte qui nous concerne au premier titre !?

Et moi qui croyais être le premier à pouvoir me réclamer de cet univers ! Faut-il se désespérer de la nature humaine ?! Pour ceux et celles qui croient encore que le métissage n'est qu'une figure de l'esprit et qui prêchent à cor et à cris les vertus de la « pureté de la race humaine » (sic). En voilà une bien bonne qui devrait les réconcilier avec la réalité toute nue. Selon une nouvelle toute fraîche parue ces jours-derniers dans la grande petite presse parisienne (AFP) —et si, toutefois, l'affaire s'avère scientifiquement fondée—, tenez-vous bien... le « métissage est censé dater de 4 millions d'années ».

Et moi qui croyais que notre épopée avait débuté en 1672, avec l'arrivée à Chicoutimi de l'ancêtre Nicolas Peltier. Me voilà quitte pour m'excuser au regard de l'histoire et faire preuve d'humilité criante à l'endroit de nos premiers vrais et réels ancêtres !

Ainsi donc, selon le gratin journalistique parisien qui s'abreuve aux sources de l'Hélicon étatsunien, « les ancêtres de l'homme et du chimpanzé se seraient croisés pendant des millions d'années, avant une séparation définitive beaucoup plus récente que l'on ne pensait, selon une étude publiée dans « Nature » ». Cette découverte pour le moins démoralisante provient plus exactement de chercheurs américains de la Havard Medical Scholl à Boston, qui affirment, la face en grimaces, que les deux lignées (hominidés et singes) se seraient d'abord séparées il y a 6,3 millions d'années voire, peut-être, de moins de 5,4 millions d'années (la marge d'erreur chronologique n'est donc que de 20% !). Mais ne nous méprenons pas sur la réalité des choses malgré tous les flous brumeux de l'hypothétique découverte, ces galipettes simiesques « ne les a pas empêchées de procéder à des échanges de gènes », avant que le divorce (cette histoire d'amour honteuse a donc, fort heureusement pour nous, une fin malheureuse) n'ait été proclamé « qu'au terme d'une période de métissage qui a duré peut-être 4 millions d'années ».

Je ne voudrais pas paraître rabat-joie pour ceux et celles qui, de nous les Métis de la Boréalie, se battent pour obtenir leurs droits ancestraux ; mais, avez-vous pensé à ce qui pourrait arriver à notre lutte ancestrale si tous les singes qui sévissent dans les zoos d'Amérique du Nord, Centrale et du Sud, découvrent les termes de l'article 35(1) de la Constitution canadienne et se mettent à réclamer les droits des « Premières Nations » embrassant ceux des Nations métisses du pays ?!!!

Si mon nom était Gill et que j'étais Sénateur, si j'étais Grand Chef de la nation des « Êtres humains » ou Whatever, j'y repenserais sept fois plutôt qu'une avant de nier les droits des autres Autochtones de ce pays...

Russel Bouchard
(J'ose plus vous étaler mes racines ancestrales !)

mercredi, mai 03, 2006

Le jugement Kruger, la table est mise pour les Métis

Après avoir subi un cuisant échec devant la Cour d'appel du Québec qui a renversé (jugement du 28 avril 2006) l'ordonnance de sauvegarde émise l'an dernier en faveur des Innus de Pessamit par la Cour supérieure, le chef Raphaël Picard ne baisse pas pavillon et promet de revenir devant les tribunaux —la Cour suprême du Canada s'il le faut !— pour faire valoir les droits ancestraux de sa bande. Dans cet autre jugement aux considérants aussi surprenants que conséquents, le chefs risque gros, très gros même, car ce ne sont plus seulement les prétentions du chef versus l'aménagement du territoire dont il sera question mais bien du titre aborigène lui-même. À mon avis, c'est là un net recul pour les Ilnutsh, car ce titre ils l'avaient déjà en poche, dans le principe et dans les faits, sans traité formel, avec la signature de l'Approche commune le 31 mars 2004. Les autres chefs, qui attendaient dans le silence le prononcé du jugement, ont lieu d'être inquiets, puisque le titre aborigène, pour ceux qui ne savent pas, c'est le droit ancestral le plus important, le droit inaliénable qui confirme : 1- le droit naturel du premier occupant ; 2- celui de la propriété du territoire ; et 3-, celui du droit de regard sur les éléments qui s'y conjuguent. Ce qui n'est pas rien quand on se dit des « Premières nations » du Canada !...

Ce matin, mercredi 3 mai 2006, en réplique à ce cuisant échec, contenant avec peine ses émotions, le chef Picard remet fer et feu sur l'enclume ; il annonce d'ajouter à sa poursuite une requête en nullité pour faire annuler les permis d'exploitations de 26 compagnies forestières, et une requête amendée dans laquelle il prétend que le territoire revendiqué fait partiellement partie de la Convention de la Baie-James, une convention qu'il n'a pas signé. Cette affaire est donc loin d'être terminée, puisque la Convention de la Baie James a été signée par des Cris et des Inuits et qu'il y a là matière à conflits juridiques majeurs selon le concept jurisprudentiel de « l'exclusivité des droits ».

Et si l'on tient compte du fait —dont il a bien pris soin de ne pas évoquer— que les Métis de la Communauté métisse du Domaine du Roy et de la Seigneurie de Mingan sont présentement devant les tribunaux dans une requête en approvisionnement pour faire valoir leurs propres droits dans l'affaire de l'île René-Levasseur, nous sommes loin de la conclusion de cette cause historique qui risque d'embrasser toutes les autres. En effet, le chef Picard ayant plaidé l'arrêt Haïda (qui oblige les gouvernements à consulter et à négocier de bonne foi) et ayant été défait sur ce point crucial (puisqu'il a plutôt été démontré le contraire), il s'est lui-même obligé à en reconnaître les effets et conséquences eu égard à d'autres groupes autochtones placés dans cette situation, dont les Métis de ce territoire qui s'estiment lésés à la fois par les gouvernements supérieurs et par les agissements des Ilnutsh qui font comme s'ils n'existaient pas (la bonne ou mauvaise foi des uns et des autres ne sera donc pas difficile à démontrer dans le cas des Métis, puisqu'ils sont totalement évacués du jeu, et que le gouvernement du Québec témoigne d'un total mépris à leur égard).

En conclusion, si les Ilnutsh ont raison de ne pas pavoiser ces jours-ci avec les effets pervers de cette cause où l'un d'entre eux s'applique à étirer l'élastique jusqu'à son point de rupture, les Métis de la Boréalie voient, pour leur part, se rapprocher les échéances où ils ont un important rendez-vous avec l'Histoire, un rendez-vous qu'ils entendent ne pas manquer...

Russel Bouchard

Extrait du jugement du 28 avril 2006, dans l'affaire de l'île René-Levasseur :

«4. Dans l’arrêt Haïda cité précédemment, la Cour suprême a noté qu’à cause de leurs exigences, les procédures mentionnées plus haut peuvent ne pas donner satisfaction aux peuples autochtones dans le cas où il y a violation apparente de leur titre aborigène ou de leurs droits ancestraux. En conséquence, la Cour suprême a enseigné que, lorsqu’un gouvernement a connaissance, concrètement ou par imputation, de l’existence potentielle d’un titre aborigène ou d’un droit ancestral et qu’il envisage de poser des actes qui sont de nature à avoir un effet préjudiciable à ce titre ou ce droit, ce gouvernement a l’obligation de consulter le peuple autochtone en cause et, si nécessaire, d’adopter des mesures d’accommodement.
5. Il résulte que, dans ces circonstances, si un gouvernement ne consulte pas le peuple autochtone, celui-ci jouit d’un recours supplémentaire (appelons-le « La requête Haïda ») à ceux que sont l’injonction finale, l’injonction interlocutoire, l’injonction provisoire ou l’ordonnance de sauvegarde. En d’autres mots, sous réserve de ses procédures en injonction et indépendamment de celles-ci, le peuple autochtone qui prétend ne pas avoir été consulté ou ne pas jouir de mesures d’accommodement appropriées peut, par une requête Haïda, faire constater l’absence de consultation ou l’insuffisance des mesures d’accommodement et obtenir une réparation quelconque. Ainsi, dans un cas donné, avant même que le tribunal n’entende les parties sur la requête pour injonction finale ou sur la requête pour injonction interlocutoire, il peut décider que le peuple autochtone aurait dû être consulté, déterminer les mesures d’accommodement qui auraient dû être prises et ordonner des mesures réparatrices. Le jugement sur cette requête spéciale n’a rien à voir avec les jugements qui seraient éventuellement rendus sur la requête pour injonction interlocutoire ou la requête pour injonction finale. En effet, si, par le jugement final, il allait être déclaré que le peuple autochtone ne jouissait pas d’un titre aborigène ou d’un droit ancestral, cela n’aurait aucun effet sur le jugement rendu sur la requête spéciale. Le jugement qui aurait accueilli la requête Haïda aurait été régulièrement prononcé sur l’apparence d’un titre aborigène ou d’un droit ancestral et en application du devoir du gouvernement d’agir honorablement à l’endroit du peuple autochtone.
6. Comme la requête Haïda est en réalité une procédure interlocutoire, en théorie rien ne s’oppose à ce que la partie requérante recherche une ordonnance de sauvegarde en attendant que le tribunal puisse entendre la requête. Mais, dans ce cas, encore faut-il que la situation soit d’une extrême urgence. »