lundi, février 20, 2006

Les Métis de la Boréalie, des Autochtones à part entière et des incontournables

Tout considéré, s’il y a un groupe d’autochtones qui sort plus gagnant que perdant des récents jugements de la Cour suprême du Canada, c’est le groupe des Métis de la Boréalie, qui a pris naissance autour du poste de traite de Chicoutimi et dont les familles n'ont eu de cesse d'essaimer depuis 1672, de la baie James à la côte du Labrador. Voyons plutôt :

PRIMO, contrairement aux Micmacs de la double cause Marshall - Bernard, les Métis de Chicoutimi n’ont pas à faire la preuve qu’ils étaient là avant les contacts, puisqu’ils sont le fruit des contacts (Van der Peet et Powley sont formels à ce sujet).

« 16 Dans cet arrêt[arrêt Van der Peet] l’accent mis sur l’occupation antérieure du territoire comme principale justification de la protection spéciale accordé aux droits ancestraux a amené les juges de la majorité à adopter un critère fondé sur l’antériorité au contact avec les Européens pour identifier les coutumes, pratiques ou traditions faisant partie intégrante d’une culture autochtone donnée et bénéficiant, de ce fait, de la protection de la Constitution. Cependant, les juges majoritaires ont reconnu que ce critère pouvait se révéler inadéquat pour reconnaître les coutumes, pratiques ou traditions métisses ayant droit à la même protection, puisque, par définition, les cultures métisses sont postérieures au contact avec les Européens. Pour cette raison, le juge en chef Lamer a expressément indiqué que la question de la définition des droits ancestraux des Métis devait être réglée à l’occasion d’un autre pourvoi. »
« 17 Comme il a été indiqué plus tôt, l’inclusion des Métis à l’art. 35 ne saurait évidemment pas être appliquée par le fait qu’ils auraient occupé le territoire canadien avant le contact avec les Européens. L’objet de l’art. 35 en ce qui concerne les Métis n’est donc pas le même qu’en ce qui concerne les Indiens et les Inuits. Le trait important qui caractérise les Métis du point de vue constitutionnel est leur statut spécial en tant que peuples ayant vu le jour entre le premier contact des Indiens avec les Européens et la mainmise effective de ces derniers sur le territoire. L’inclusion des Métis à l’art. 35 représente l’engagement du Canada à reconnaître et à valoriser les cultures métisses distinctives, cultures qui se sont développées dans des régions n’étant pas encore ouvertes à la colonisation et qui, comme l’ont reconnu les rédacteurs de la Loi constitutionnelle de 1982, ne peuvent survivre que si les Métis bénéficient de la même protection que les autres communautés autochtones. »
Cf., Powley, 19 septembre 2003.


SECUNDO, preuves historiques et généalogiques à l’appui, ils sont capables de démontrer vigoureusement qu’ils ont occupé de façon ininterrompue les territoires dont ils se réclament, soit de 1672 à aujourd’hui : ils sont capables d’établir la preuve qu’ils étaient là en 1700 ; là en 1759 ; là en 1763 ; là en 1800 ; là en 1842 et en 1843, soit avant et après que l’État ait affirmé sa souveraineté sur ce territoire ; la preuve qu’ils étaient là en 1851 et qu’ils y sont encore aujourd’hui.

TERTIO, les limites de leur « pays » (le Domaine du Roi, également dit Postes du Roi) sont bien connues et ont été reconnues par le roi de France en 1733 ; ce que la Couronne britannique a reconduit de facto et perpétué par la reconnaissance des King’s Posts, aux lendemains de la Conquête.

QUARTO, d’août 1842 (donc, avant que l’État n’affirme sa souveraineté sur ce territoire) à l’automne 1852 (mort du Métis chicoutimien Peter McLeod, Jr) ce sont justement les Métis qui exploitent les scieries du secteur, qui exportent du bois (d’ailleurs avec leur associé Price) en Angleterre et aux États-Unis.

Et QUINTO, en plus d’être liée à la chasse, à la pêche et à la cueillette, la culture des Métis de Chicoutimi est intimement —et, exclusivement, dans le sens jurisprudentielle du terme— liée à celles des affaires, du commerce, de l’exploitation forestière, ce qui en fait alors les maîtres du pays à l’époque.

Qui dit mieux !…

Russel Bouchard

2 commentaires:

Anonyme a dit...
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blogue.
Anonyme a dit...

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